Content area
Full Text
La personnalité de Courbet et la réception critique de ses oeuvres constituent un enjeu important pour de nombreuses études ou expositions récentes. Courbet "l'émeutier", le "scandaleux" ou le "réfractaire", mais aussi Courbet "le promoteur de son oeuvre", le "Maître-peintre" et bien avant le "Narcisse paysan"1, toutes ces désignations offrent de nouvelles perspectives de recherches et enrichissent le débat autour de la personnalité de l'artiste comme vecteur essentiel de son oeuvre. La liste des qualificatifs succède désormais à celle des sobriquets qui satisfaisait du vivant de Courbet le désir de railleries des caricaturistes et les humeurs maussades de certains plumitifs. De façon déterminante, ce bouleversement dans l'appréhension de l'oeuvre de Courbet légitime sa démarche au-delà de l'image conventionnelle du peintre dit "réaliste" totalement effacé derrière son motif. C'est un peu comme si le sens et la destinée de cette peinture s'organisait autour de la figure charismatique de Courbet. La position occupée par l'artiste dans l'analyse de son oeuvre apparaît notamment dans les différences de traitement entre les autoportraits et les portraits. Une telle différence de conception dans la représentation de la figure mérite quelques éclaircissements. Tout d'abord apparaît un Courbet mis en scène par lui-même, suivant un decorum où intervient une somme de référence attachée au mode de vie bohème et à l'imaginaire romantique. Peu de temps après son arrivée à Paris, ces éléments sont mis en place au sein des autoportraits afin d'illustrer la vie initiatique, drôle et singulière, d'un jeune provincial fréquentant le milieu littéraire et artistique du coeur de Paris. Par la suite, Courbet dans la décennie 1840 multiplie les portraits de ses contemporains. Cette activité se développant, suscite parfois de vives réactions de la part de ses modèles. À l'exception du portrait de Baudelaire2, et de celui du théoricien Proudhon3, l'auteur du Principe de l'art et de sa destination sociale* représenté en famille, l'artiste n'a jamais voulu signifier l'appartenance du représenté à un groupe social par l'introduction de signes distinctifs.
La vision traditionnelle de l'être, celle que l'on rencontre par exemple chez les peintres et les photographes officiels du second Empire, comme dernière manifestation du portrait d'apparat, se trouve quelque peu bouleversée et réduite à sa plus simple expression dans les portraits de Courbet. Elle se limite souvent à une présentation...