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On connaît l'aversion d'Erasme pour la bière ou eervoise, que ses séjours en Angleterre lui faisaient peut-être une obligation de boire, quand sa provision de vin grec ou de bourgogne, de provenance amicale, venait à lui faire défaut.1 S'il est une constante, chez cet homme accusé par ses ennemis - et même par des historiens de bonne foi - de sautes d'humeur ou de changements d'optique, c'est bien cette double polarité de sens contraire. "A la première lampée, confie-t-il à son ami Marc Laurin, il (ce vin de Bourgogne) n'était pas tellement agréable au palais, mais tout à coup, mon estomac s'est trouvé vivifié et je me suis senti un autre homme... Ce vin était d'une couleur très agréable, d'un rouge vif, d'une saveur ni sucrée ni sèche, mais moelleuse, et si doux à l'estomac, que même bu en abondance, il ne faisait pas de mal," (Bâle, 1er février 1523). Mais pour la eervoise, l'enthousiasme poétique lui manque !
Erasme était-il un grand connaisseur en vins, et notamment en vins de Bourgogne ? Nous laisserons aux historiens de la vigne et des vins et aux historiens-gastronomes le soin de répondre, leur Erasme dans une main, un verre de vin dans l'autre. Ce qu'il y a de sûr, c'est que le témoignage de l'humaniste hollandais est souvent invoqué par des auteurs, médecins ou fonctionnaires, marchands et cultivateurs lettrés, comme un argument déterminant de l'excellence des crus, de la qualité du vignoble. C'est ainsi qu'en 1705, un livre publié à Beaune sur la Défense du vin de Bourgogne contre le vin de Champagne (Defensio vini Burgundiani adversas vinum Campanum) donne comme élément d'appréciation les goûts et la pratique d'Erasme î D'autres ouvrages démontreront d'ailleurs savamment, comme la dissertation d'un certain Duvrac, bachelier en médecine, que rien n'égale les vins de Paris, car son terroir est le plus propice à la qualité des crus.2
Mais ce n'est pas de vin queje veux parler ici, c'est de bière. Au chapitre 29 du titre 46 d'un énorme traité de plus de 1000 pages, intitulé Traité de la Police,3 dont l'auteur est un certain M. de la Marre, "Conseiller Commissaire du Roy au Châtellet de Paris", il est question de la bière et de son origine. Le rédacteur du compte rendu...