RESUMEN: El artículo explica la evolución producida en la política escolar de la Francia colonial en la isla de Reunión, en el océano Índico, inicialmente de estruc- tura esclavista. Analiza los primeros esfuerzos escolarizadores con la contribución de las congregaciones religiosas, de decidida asimilación cultural. Más tarde, la III Repú- blica francesa incrementa su política escolar laica y asimiladora. Finalmente, desde 1946, la isla de Reunión, uno de los restos del I Imperio francés, adopta el formato de departamento administrativo de Francia, y la final conversión en territorio euro- peo ultraperiférico. Concluye con la valoración de las consecuencias que estas deci- siones administrativas provocan en su avance escolar primario, secundario y superior.
PALABRAS CLAVE: Isla de Reunión, Francia, colonialismo, sistema escolar, asimila- ción cultural.
ABSTRACT: This paper analize the evolution of the colonialist French school policy in the island of Reunion, Indic Ocean, with a slave structure from the I Empire. Studies the first official efforts for the people schooling with the contribution of the religious congregations. Their proposal was the cultural assimilation. Later, the French Third Republic encreases secular assimilation policy. Finally, from 1946, the Reunion Island remains one of the first French empire, and begins to be administrative department of France, and remoteness becomes European territory. It concludes by studying the progress made in the first school, secondary and higher education, in the island of Reunion.
KEY WORDS: Island of Reunion, France, colonialism, school system, cultural assimilation.
SI LES RAPPORTS ENTRE L'ÉCOLE ET LA SOCIÉTÉ sont loin d'être nouveaux et alimentent une importante littérature scientifique, médiatique et polémique, avec la vague néolibérale qui a déferlé sur le monde, jamais l'école n'a été autant a coeur du débat public. Renouvellement du questionnement scientifique sur l'approche des politiques scolaires, émergence de questions nouvelles, actuali- tés politiques et économiques se conjuguent pour nous permettre de revisiter, dans une démarche sociohistorique, le développement de l'École à l'île de La Réunion1, colonie française jusqu'en 1946, puis département français d'outre-mer, et enfin, depuis 1983, région européenne ultrapériphérique2. En choisissant de nous intéres- ser à l'École à l'île de La Réunion, société née de la volonté des puissances euro- péennes à disposer sous les tropiques des centres de production profitables à leur commerce et à leur développement, nous allons la voir se construire et se déve- lopper dans un lien exigu, clos et sur des temps courts. Une démarche qui requiert des faits tant historiques que sociologiques et nous impose de penser l'école dans des contextes et temporalités où la complexité est fortement présente3.
Notre travail, qui couvrira une période de plus d'un siècle et demi, démarrera avec la rétrocession de l'île de La Réunion à la France, en 1815, après l'échec des guerres napoléoniennes, pour s'achever en 1983, avec la transformation du départe- ment français en région ultrapériphérique de l'Union Européenne. Il comprendre trois parties: la première traitera des vifs débats qui opposent les autorités du royaume de France, de la colonie et la société coloniale autour des politiques sco- laires qu'il convient de mettre en oeuvre dans la colonie. Dans une deuxième par- tie nous traiterons de l'appropriation à La Réunion du modèle républicain avec la traduction éducative au croisement d'une politique coloniale et éducative dont il est nécessaire de rappeler que l'une et l'autre sont portées en France par Jules Ferry. La dernière partie, enfin, aura pour cadre la transformation de La Réunion en département français d'outre-mer, dont il nous faudra tenter de comprendre son retentissement sur les questions scolaires.
1. Colonie servile et politique scolaire: contradiction, conflits
La Réunion a une histoire intimement liée au fait colonial4. Sur une terre vier- ge, la France a créé de toutes pièces des structures économiques et sociales dépen- dantes et périphériques destinées à satisfaire les besoins de son économie. C'est la Compagnie des Indes orientales à qui a été confié, par les autorités royales, l'ex- ploitation de la colonie, qui impose aux colons la culture du café; c'est elle qui le commercialise et c'est toujours elle qui bénéficie du monopole d'introduction des marchandises à Bourbon. Après la faillite de la Compagnie des Indes, en 1764, l'île Bourbon devient colonie du Royaume et se voit imposer de nouveaux cycles éco- nomiques, d'abord celui des vivres puis celui du sucre, après la perte de Saint- Domingue. Dès les origines donc, l'économie de Bourbon est totalement excentrée, presqu'entièrement composée d'un seul secteur organisé pour fournir à la fois des matières premières et des débouchés à l'économie métropolitaine. Une économie dont l'esclavage est le moteur, avec des victimes embarquées de force à Madagascar, sur la côte orientale d'Afrique, aux Indes, et de façon plus résiduelle en Afrique de l'Ouest, voire en Malaisie5.
Ce recours à la population servile se fonde sur une argumentation idéologique, construite sur l'infériorité biologique des populations de couleur, les limites de leurs besoins et leur adaptation aux conditions climatiques des tropiques. Mais, dans cette société construite autour d'une structure duale, maître/esclave, les colons vont devoir assumer des stratégies contradictoires dont certaines vont profondé- ment perturber l'agencement de la colonie. C'est ainsi que pour se ménager une relative indépendance économique, les colons, spécialisent certains de leurs esclaves dans des métiers artisanaux6. Une stratégie qui va contribuer à éliminer du proces- sus économique les libres de couleur et également la population blanche pauvre et considérablement accroître leur paupérisation suivant une pente dangereuse pour la survie même du système esclavagiste7. Un fossé va désormais se creuser entre grands propriétaires terriens, moyens et petits colons incapables de mobiliser les investissements nécessaires à l'extension de leurs terrains et à la rationalisation des techniques de production. C'est donc une unité de production aux dimensions modestes qui caractérise la société esclavagiste de Bourbon, très éloignée du système de plantation des Grandes Antilles, du Sud des États-Unis et de certains territoires de l'Amérique latine. Autre caractéristique qui singularise Bourbon, c'est la situation de la population blanche, dont l'immense majorité est paupérisée, un phénomène sans équivalent dans l'histoire des colonisations européennes8.
C'est dans cette société travaillée par des logiques contradictoires que la ques- tion de l'École va se poser à la fin du XVIIIe siècle, à la conjonction de plusieurs éléments: la guerre franco-anglaise dans l'Océan Indien, l'émergence des libres de couleur en tant que groupe social, et le «choix» du sucre comme culture principale9. Dès le Traité de Paris (1815) et la rétrocession de Bourbon à la France, qui est désormais, avec la perte de l'Isle de France, devenue colonie anglaise, la seule colo- nie française dans l'Océan Indien, les politiques scolaires dans la colonie ne peu- vent plus se satisfaire de leur caractère expérimental et discontinu. Une perception nouvelle de l'École s'impose autour des enjeux politiques, économiques et sociaux propres à la colonie. Très tôt, une série de débats et de conflits apparaissent entre pouvoir central et société coloniale, mais aussi à l'intérieur de la société coloniale, sur le dispositif qu'il convient d'arrêter, sur les éléments qu'il est nécessaire de privilégier et sur la contribution à confier à l'éducation10. Deux de ces conflits nous semblent particulièrement significatifs. Le premier concerne toute la ques- tion de la détermination sociale de l'accès à l'instruction: les formes scolaires à effectuer et leur agencement avec les rapports entre groupes sociaux qui structu- rent la société bourbonnaise. Pour le pouvoir central, il ne s'agirait d'ouvrir dans la colonie que des écoles élémentaires et réservées aux seuls libres de couleur. D'emblée, les esclaves en sont exclus. Il n'y a pas de législation officielle qui codi- fie l'interdiction pour l'esclave de bénéficier de l'éducation mais elle est dans l'ordre des choses. Quant aux blancs pauvres, eux non plus ne sont pas concernés, alors qu'ils constituent l'immense majorité de la population blanche. De l'école, les autorités centrales attendent qu'elle accueille les libres de couleur mais en leur offrant une intégration contrôlée avec la politique de ségrégation mise en place sous le Consulat et l'Empire et dont il s'agit d'assurer la pérennité11.
Quant à l'enseignement secondaire, il n'est pas question pour les autorités cen- trales de permettre son développement dans la colonie. Une position qui, pour être comprise, demande à être rapportée aux controverses en France autour de la créa- tion de collèges, des établissements jouant un rôle essentiel dans la production et la reproduction de la bourgeoisie comme classe dominante12. En effet, la Monarchie, qui fait tout en France pour contenir le développement de ces établissements, pou- vait très difficilement accepter d'en ouvrir un dans sa lointaine colonie de l'Océan Indien. Mais ce processus de mobilité que cherchent à contrôler les autorités royales ne suffit pas pour rendre compte de leur opposition à l'ouverture, à Bour- bon, d'un établissement secondaire. En effet, plus grave que la mobilité redoutée, il y a pour les autorités le danger de voir se développer dans la colonie le fameux «esprit colon» pouvant déboucher sur l'autonomie de Bourbon. Mais les choix des autorités centrales rencontrent l'opposition de l'administration locale censée les mettre en oeuvre et surtout la vive contestation de la bourgeoisie bourbonnaise.
Pour l'administration locale, il semble difficile d'ouvrir des écoles élémentaires pour les seuls libres de couleur en laissant à la porte des blancs qui, bien que pauvres, sont blancs et jouissent dans la société servile d'une supériorité légitimée comme naturelle. De plus, faire le choix des seules écoles élémentaires accueillant des pauvres -à fortiori de couleur- revenait à exclure en raison de la nature de la société, des enfants dont les parents, bien que possédants, ne jouissaient pas de revenus suffisants pour aller étudier en France, à l'instar de ceux de la grande bourgeoisie13. Mais, plus fondamentalement, pour la société coloniale recourir à des établissements métropolitains pour former son élite est à exclure. Pour le conseiller colonial Auguste Pajot, qui théorise cette position, envoyer la jeunesse de Bourbon se former en France, c'est l'éloigner de la «spécificité créole» qui por- terait fatalement atteinte à l'ordre colonial14. L'obtention d'un collège de plein exercice à Bourbon est pour la bourgeoisie coloniale une exigence sur laquelle elle n'entend pas transiger tant il y va de sa survie. C'est à travers ces contradictions et conflits que s'impose finalement la nécessité d'accueillir dans les écoles élémen- taires des blancs pauvres et que se trouvent réalisées les conditions nécessaires à l'implantation d'un collège que la bourgeoisie locale arrache au pouvoir royal.
C'est à deux congrégations enseignantes -les Frères des Écoles chrétiennes pour les garçons et les Soeurs de Saint-Joseph de Cluny pour les filles- que les autorités décident de confier l'enseignement élémentaire. Les deux congrégations ouvrent leurs premiers établissements en 1817. Quant à l'établissement secondaire, créé sur la base des Collèges royaux de France, il accueille ses premiers élèves en janvier 1819. Toutefois, il ne s'agit pas pour la société esclavagiste d'atténuer les différences sociales et raciales mais de construire un système éducatif adapté à ces différences et par là-même les légitimer.
Un deuxième moment important apparaît alors. Il porte sur les modes pédago- giques et politiques qu'il convient de privilégier pour la culture scolaire des diffé- rentes clientèles sociales. Pour les enfants pauvres, l'enseignement doit offrir, hors du milieu familial où on les extrait, un lieu qui doit les éloigner des mauvais exemples et aussi les entrainer à un travail discipliné. Frères des Écoles chrétiennes et Soeurs de Saint-Joseph de Cluny sont tenus de fournir des connaissances élémen- taires à finalités utilitaires aux blancs pauvres et libres de couleur. Les rudiments scolaires à transmettre, les agents qui en ont la charge et les conditions de trans- mission constituent autant de données que la société coloniale entend contrôler. A la veille de l'abolition de l'esclavage, alors que les jeunes esclaves n'ont toujours pas accès à la scolarisation, les mesures prises à la fin de la Monarchie de Juillet par les autorités royales pour préparer leur intégration étant systématiquement détour- nées dans la colonie, à Bourbon compte 14 établissement d'enseignement primaire, 7 pour les Frères des Écoles chrétiennes et autant pour les Soeurs15. Ces établisse- ments accueillent un total de 2863élèves (Lucas, 2006). Mais c'est avec l'abolition de l'esclavage, qui fait accéder, en 1848, 60 000 esclaves au statut de citoyen, qu'on assiste à un véritable développement de l'école élémentaire dans la colonie. Comme naguère, avec les libres de couleur, il s'agit en effet désormais d'intégrer les enfants des nouveaux citoyens. En son temps, la mise en place d'un premier réseau d'éta- blissements primaires avait fait apparaître un ensemble complexe de variables qui avaient incité les autorités à faire le choix des congrégations enseignantes. Pour l'essentiel, ce sont ces variables et leurs effets composés qui pousseront les autori- tés mises en place par la IIe République de faire des choix similaires. Pendant une quinzaine d'années, les créations d'écoles primaires vont se succéder dans l'île à un rythme bien plus rapide que celui de la période antérieure à l'abolition. De 1850 à 1865, les Frères ouvrent 13 écoles dans la colonie. Entre 1852 et 1872, ce sont 12 écoles et un pensionnat qui sont ouverts par les Soeurs de Saint-Joseph de Cluny (Lucas, 2006).
Du côté de l'enseignement secondaire c'est autour du Collège Royal que se focalisent les débats sur la formation de l'élite coloniale. Organiser sur place une culture d'excellence moderne mais surtout soucieuse de veiller à la pérennisation d'un mode esclavagiste, telle est la mission que les notables confient au Collège Royal. Rien n'est donc trop ambitieux, politiquement et institutionnellement, ni trop exigeant, scientifiquement et pédagogiquement, ni trop dispendieux pour atteindre les objectifs dont la mission est confiée au Collège Royal. Une succes- sion de textes, de mesures, de décisions va chercher à articuler culture scolaire à diffuser et positions sociales à reproduire. Mais il ne s'agit pas, à travers toutes ces dispositions, de constituer un système où le Collège Royal, puis lycée après 1848, viendrait prolonger ou parachever les écoles élémentaires. Les intérêts en jeu dans la diffusion de l'enseignement secondaire sont donc internes à la bourgeoisie blanche. En 1820, l'établissement compte 25 élèves, ils seront 100 de plus en 1830 et 260 à la veille de l'abolition de l'esclavage (Lucas, 2006). Ce qui se joue au Collè- ge Royal c'est l'apprentissage d'une manière d'être, la recherche d'un certain esprit, la sédimentation d'un moi colonial, autrement dit un «habitus» colonial dans un établissement qui est la pièce maîtresse de la structure de domination propre à la société coloniale.
2. Modèle républicain, données coloniales, traduction scolaire
L'événement de la IIIe République en France crée une donne nouvelle dont les effets se déploient dans de nombreux domaines. C'est ainsi que sur le plan poli- tique, les Républicains qui accèdent au pouvoir se lancent dans un plan d'expansion colonial qui connaît un rythme particulièrement intense sous les gouvernements de Jules Ferry16. Comme le note Denise Bouche, «Des entreprises sont alors conduites simultanément sur tous les points où la France avait d'anciens droits ou de vieilles ambitions» et un second empire colonial est ainsi constitué17. Diffuser la civilisation est la raison avancée pour justifier l'expansion coloniale avec l'assimilation comme principe. Pour Rober Bastide, ce choix de l'assimilation, comme principe structu- rant, illustre ce qu'il appelle «le préjugé culturel» très répandu chez les Français: «Nous croyons que notre civilisation est sa culture sont supérieures aux autres civi- lisations et aux autres cultures. Nous sommes toujours des missionnaires [...]»18. Présente sur tous les territoires du domaine colonial français, cette politique d'assi- milation connaîtra cependant des rythmes différents. Toutefois c'est à la Marti- nique, à la Guadeloupe, à la Guyane et à La Réunion, ces quatre colonies qui nous restent du premier empire, que la politique d'assimilation sera la plus intense.
Mais l'assimilation est également une démarche interne à la société réunionnai- se. Elle traverse toute son histoire et structure sous la IIIe République les débats autour de la Réforme coloniale, portés par la moyenne bourgeoisie19. Alexandre de La Serve qui est, avec François de Mahy, le théoricien de ce mouvement, reven- dique: «l'assimilation complète de la colonie aux départements du continent pour ce qui concerne la magistrature, le clergé, l'instruction publique [...]»20. Seules les institutions métropolitaines transportées à La Réunion permettraient la transfor- mation de la colonie. Une analyse qui ne fait pas l'unanimité au sein de la moyen- ne bourgeoisie partagée entre les assimilationnistes et les partisans de l'autonomie de la colonie. Mais, le suffrage universel rétabli, ce sont les assimilationnistes qui triomphent. Ils remportent les élections législatives et sénatoriales et font une entrée en force dans les Conseils généraux et municipaux. Les nouveaux élus entendent donc faire de l'assimilation complète de la colonie aux départements métropolitains un grand chantier. Cette orientation politique va retentir sur l'Éco- le et son organisation. Les Républicains sont en effet si convaincus de l'excellence de «leur» École qu'il ne fait aucun doute pour eux que cette transplantation dans les colonies ne peut être que profitable à leurs populations. Une nouvelle organi- sation scolaire est alors recherchée, d'autant que le recours aux congrégations enseignantes s'est fait sur un malentendu lourd de conséquences.
C'est en effet sur la nécessité de développer dans la colonie un enseignement civilisateur et moralisateur visant à acculturer une future main-d'oeuvre destinée à permettre le bon déroulement du projet colonial qui a incité les autorités à faire le choix des congrégations enseignantes. L'appel aux congrégations rentre donc dans un schéma instruction/moralisation avec l'objectif de les instrumentaliser pour en faire des agents actifs d'une culture rudimentaire. Mais le projet des Frères est radicalement différent. Il vise une intégration active et l'espoir d'une mobilité. Un projet totalement incompatible avec celui de la société coloniale. Les Frères subis- sent à partir de 1870 une offensive d'une extrême violence qui les obligera dans les décennies qui suivent à fermer la quasi-totalité de leurs écoles (Lucas, 2006). La question de l'enseignement laïque peut désormais prendre forme. L'enseignement laïque, placé sous la responsabilité du directeur de l'Intérieur était jusqu'alors peu développé dans la colonie. Cette situation fait l'objet de nombreuses critiques et plusieurs mesures sont avancées pour chercher à la réorganiser. Elles trouvent dans la politique mise en oeuvre par les Républicains en France, mais également dans les politiques locales, les ressorts d'une impulsion nouvelle. L'unité d'ensei- gnement entre la France et sa lointaine colonie est alors recherchée. C'est ainsi qu'un Vice-rectorat est créé le 2 mars 1880, relevant du ministère de l'Instruction Publique. Cette nouvelle structure est dirigée par un inspecteur d'Académie qui occupe le deuxième rang de l'administration coloniale, après le Gouverneur, rele- vant, lui du ministère des Colonies21.
En 1881, sont créées sur le modèle métropolitain une École Normale et son École Annexe. Ces mesures fournissent une réelle impulsion au développement de l'enseignement laïc. En 1874, la colonie, dont la population est de 182 876 habi- tants, compte 37 écoles laïques dont 16 de garçons et accueillent au total 2 023 élèves. Sept ans plus tard, on relève 75 écoles laïques, 41 de garçons et 34 de filles, pour une population scolaire de 14 136 élèves dont 6763garçons (Lucas, 2006). Mais cette réorganisation des services de l'Instruction Publique, désormais très proche de celle en application dans un département métropolitain, transforme totalement les rapports entre les différentes administrations mais surtout entre les différents pouvoirs dans la colonie. Une situation qui inquiète les élus locaux. N'ayant plus la mainmise sur le service de l'Instruction Publique, échouant à cir- conscrire les Vice-recteurs en poste, les élus de la colonie vont se déchaîner contre la nouvelle organisation, qu'une partie d'entre eux avait pourtant réclamée. Une intense période d'hostilité les oppose au pouvoir central. Le Vice-rectorat est fina- lement supprimé en 1895, l'École Normale en 189722. Dans les années qui suivent, c'est l'École élémentaire qui est attaquée. Les équipes municipales, le Conseil géné- ral et l'administration coloniale imposent, en arguant de la situation économique et budgétaire difficiles, des suppressions d'écoles et de postes.
Si, en 1907, la colonie comptait dans les écoles laïques 5 297 garçons et 4 713 filles accueillis par 122 instituteurs et 125 institutrices, en 1908, les effectifs seront respec- tivement de 5 025 et 4 448 pour 107 instituteurs et 120 institutrices. En 1914, les 127 écoles laïques de la colonie accueillent 11 321 enfants, plus de 3 000 de moins que la population scolarisée en 1881. Quant aux enseignants, ils sont 109 instituteurs et 116 institutrices, respectivement 13 et 9 de moins qu'en 1907. En 1921, les 100 insti- tuteurs et 199 institutrices accueillent 12 939 élèves; 3673élèves étant scolarisés chez les congréganistes (Lucas, 2006). Mais, selon les statistiques du Service d'Ins- truction Publique, 12 804 enfants ne reçoivent aucune instruction. Théodore Gau- thier, chef du Service d'Instruction Publique, avant plusieurs causes pour expliquer cette situation: «La misère qui ne permet pas de donner à certains enfants des vête- ments décents», le caractère montagneux de l'île «où 3 ou 4 kilomètres sont un obstacle sérieux qui éloigne de l'École, lorsqu'ils comprennent des torrents encais- sés qu'une forte pluie rend dangereux» mais aussi la faiblesse de l'offre scolaire «de nombreuses agglomérations de 75 ou 100 enfants sont dépourvues de toute école» et enfin «l'indifférence des parents»23. En 1930, les 153 écoles laïques de la colonie accueillent 18 639 élèves qui sont confiés à 116 instituteurs et 256 institutrices (Lucas, 2006). Des élèves dont beaucoup fréquentent l'école très irrégulièrement et la quit- tent très tôt. Le paludisme et la misère des familles sont les deux principales causes d'absentéisme. Quant aux taux de réussite au certificat d'études primaires en 1930, il n'est que de 2,41%. Le Service d'Instruction Publique «a encore beaucoup à faire» concluait le chef de service, avant d'ajouter que «si les moyens d'y remédier sont aisé à indiquer, il est plus malaisé de les appliquer [tant] ils se résument à obtenir des municipalités et ensuite du Conseil général, les crédits nécessaires à: a) à la construction et à l'ouverture d'école nouvelle; b) au fonctionnement des oeuvres sociales qui intéressent directement l'Ecole; c) à une lutte rationnelle et active contre le paludisme»24.
Une situation qui n'évoluera guère dans les dernières années de la période colo- niale. Tout autre est la situation de l'enseignement secondaire dans la colonie. Dif- férentes mesures sont prises à la fin de la décennie 1870 pour classer le lycée de la colonie dans la deuxième catégorie des lycées de France, puis pour réaliser sur le plan du personnel, des programmes et des examens, l'assimilation de l'établisse- ment à ceux de la métropole. Qualifiée «d'arche sacrée», le lycée mobilise une vigilance exacerbée et permanente de la société coloniale. En 1905, le conseiller général A. Hugot, président de la commission du Budget, proteste contre le Gou- verneur qui, lors de son discours d'ouverture, «a prononcé une phrase» qui «semble reprocher à la colonie de faire beaucoup trop de dépenses pour l'ensei- gnement secondaire». Pour Hugot, «il est bon que l'on sache que le lycée est pour notre colonie un outil indispensable»25. Mais sur le sens de cette nécessité, il convient de s'entendre. En effet, il ne s'agit surtout pas d'ouvrir l'établissement au plus grand nombre. Ainsi, les tentatives de certains chefs de service de permettre, au nom de «l'idéal républicain d'égalité», l'accès au lycée «aux élèves méritants des écoles primaires et aux enfants des classes prolétariennes» échouent26. Il est vrai que cette situation n'est pas spécifique à La Réunion. Dans ses travaux, Antoi- ne Prost (1968) a en effet démontré qu'en France, «le malthusianisme de l'ensei- gnement secondaire est une véritable politique de 1880 à 1930»27. Il faut attendre 1930 pou voir les enfants des milieux populaires accéder au lycée grâce à la loi des Finances du 16 avril permettant désormais la gratuité des classes du secondaire. Une loi dont l'application dans la colonie sera refusée par le Conseil général. De tous les lycées de France et des colonies, celui de La Réunion restera donc le seul établissement à ne pas proposer un enseignement secondaire gratuit. De plus, aux déterminations s'ajoutent les discriminations raciales pour aiguiller sur d'autres chemins que le lycée les élèves méritants de l'école primaire.
Si les différents chefs de service se félicitent que le lycée Leconte de Lisle «n'a jamais considéré la couleur des élèves» en 1911 dans son rapport «sur le fonctionne- ment du lycée» Berget note que «l'élément blanc domine encore la proportion d'au moins huit dixièmes»28. Trente ans plus tard, Albert Ramassamy explique «qu'entré au lycée en 1941, il le quitte au bout d'une semaine», poursuivi par les vindictes de ses condisciples qui le surnomment «Massalé»29. Albert Ramassamy, comme de nombreux élèves de sa situation, fera le Cours normal pour commencer dans sa carrière comme instituteur au sortir de la colonie. Pour les autres élèves interdits de lycée, dont les parents étaient aisés, ils pouvaient tenter leurs chances au Petit Sémi- naire de Cilaos, ou s'inscrire dans un établissement secondaire de Madagascar dont le plus prestigieux est le collège Saint-Michel, de Tananarive, dirigé par les Jésuites.
Il s'agit donc au lycée Leconte de Lisle de former une élite pourvue d'un capital économique et racial en conformité avec les lignes de force de la société coloniale. Cette élite est essentiellement masculine. Il a fallu en effet attendre 1913 pour assister à une première tentative de création d'un enseignement secondaire féminin public dans la colonie. C'est le proviseur Adrien Berget qui fusionnera deux pensionnats laïques pour créer un nouvel établissement proposant un enseignement primaire supérieur et un cours secondaire30. L'établissement, qui prit le nom de collège Juliet- te Dodu, après de nombreuses polémiques, fermera ses portes l'année suivante. En 1919, une seconde tentative eut lieu, cette fois avec succès. L'établissement créé à l'initiative «du pensionnat Chauvet et par des professeurs attachés à la cause de l'en- seignement féminin» prit à son tour en février 1922 le nom de collège Juliette Dodu31. C'est au lycée Leconte de Lisle, établissement auquel a été rattaché le collège en 1934, que les jeunes filles doivent venir préparer leur baccalauréat. En 1935, le lycée accueille 578 élèves, dont 212 en classes élémentaires, 21 381 élèves fréquentant les autres établissements publics de la colonie. Une décennie plus tard, les populations sont respectivement de 746, 223 et 26 166 (Lucas, 2006).
On voit donc que les mesures républicaines sur l'École n'ont pas, dans la colo- nie, la même extension selon les secteurs, les catégories d'enseignants, et les publics scolaires concernés. Notons également que sur toute la période coloniale, l'École connaît à La Réunion un essor réel mais lent. Elle n'a pas à permettre à chacun de tenter sa chance mais bien au contraire de stabiliser l'ordre colonial par l'intégra- tion des populations successives qui font irruption sur la scène sociale. Elle cherche à imposer à tous, haute administration, personnel d'encadrement et d'en- seignement, publics scolaires, des places et rôles compatibles avec l'ordre colonial.
3. Transformations institutionnelles et nouvelles dynamiques scolaires
Avec la loi du 19 mars 1946, La Réunion passe du statut de colonie à celui de département français. Cette loi consacre le principe d'assimilation né de la ren- contre d'un mouvement interne à la société créole, qui remonte loin dans le temps, et de l'universalisme français32.
Recourir à la départementalisation pour détruire la colonisation est une entre- prise inédite dans l'histoire coloniale. Pour Aimé Césaire, rapporteur du projet de loi, la départementalisation est «un formidable raccourci historique». Elle doit permettre de «mettre fin au régime colonial, au régime des décrets, aux lois d'ex- ception, à la discrimination, à la misère aussi des budgets étriqués»33. Il s'agit donc d'exporter outre-mer des institutions qui doivent fonctionner le plus fidèlement, même si les textes proclamant l'assimilation juridique contiennent leurs propres limites. L'applicabilité systématique des textes métropolitains devient la règle, mais l'édification départementale ne se fait pas sans difficultés ni réticence. Cette édifi- cation, qui s'opère dans une société minée à 95% par le paludisme, par l'alcoolis- me, dont la consommation par habitant est de plus de 5 litres par an, et par la sous-alimentation, va retentir sur la scolarisation34.
Après la transformation de la colonie en département, le Service d'Instruction Publique devient Vice-Rectorat le 27 juin 1947. Il est confié à un inspecteur d'Aca- démie. Hypolite Foucque, chef du Service d'Instruction Publique, devient le pre- mier Vice-recteur du département de La Réunion. La Réunion retrouve donc une administration qui s'était fracassée au XIXe siècle sur un front colonial uni dans la défense de son ordre. Le nouveau Vice-Rectorat et ses services s'installent dans des conditions éprouvantes où s'ajoutent à l'héritage colonial les dégâts causés par le cyclone de 1948, dont le bilan dans le domaine de l'éducation est particulière- ment lourd: 25 écoles sont totalement détruites, 61 sont gravement sinistrées, 93 classes sont rayées de la carte35.
Pour le Vice-Recteur Foucque, l'assimilation complète de l'Instruction Publique doit être «une oeuvre progressive et d'assez longue haleine, qui exigera des assouplissements [...]»36. Dans un premier temps, l'édification administrative repose pour une grande part sur les communes, elles-mêmes sans grands moyens. C'est ainsi que sur les 401 institutrices en poste en 1947, 116 sont des monitrices communales, des enseignantes prises en charge par les communes. La question des personnels enseignants -formation, recrutement, statut- est épineuse. Deux for- mules sont alors envisagées par les autorités: l'envoi d'institutrices et d'institu- teurs en formation à Aix en Provence -il n'y a toujours pas d'École Normale à La Réunion, depuis sa suppression en 1897- et le recrutement de jeunes métro- politains célibataires pour le premier cycle du secondaire. Dans les deux cas, les autorités ne font pas mystère de l'importance des modélisations recherchées, qui ne pourraient être que profitables au jeune département.
A partir des années 1950, différents fonds et crédits seront conjugués pour per- mettre à l'Éducation de se développer. Les constructions scolaires, en raison de l'état des locaux existants et des créations nécessaires, sont au cours de la décen- nie et de celles qui suivent une priorité absolue. Construire beaucoup, construire vite et si possible construire bien, est le premier souci des autorités. Dans de nom- breuses communes et localités, on voit sortir de terre des dizaines et des dizaines d'écoles. Le recrutement et la formation des enseignants constituent l'autre priorité des autorités. La création d'une École Normale est demandée. De nombreuses aides et mesures sont adoptées pour permettre le développement de la scolarisa- tion37. On peut alors distinguer deux déferlantes scolaires:
- La première qui couvre la décennie 1950 , profite quasi exclusivement à l'en- seignement primaire. En 1948, 39 198 élèves fréquentaient les écoles élémentaires publiques: ils sont 56 084 en 1958. Pendant la même période, le nombre de classes élémentaires s'est élevé de 672 à 1439et celui des maîtres de 704 à 1631- tous sta- tuts compris. Un accroissement quantitatif qui s'accompagne également de l'amé- lioration des conditions mêmes d'enseignement. Les élèves «qui sont littéralement entassés dans des écoles trop rares, trop exiguës et souvent trop laides»38 sont désormais plus nombreux à être accueillis dans des bâtiments neufs et des classes nouvelles. Avant la départementalisation, on comptait 35 classes primaires de plus de 100 élèves et 52 de 80 à 100; en 1958 elles ne sont plus respectivement que 0 et 4. Toutefois on compte encore 16 classes qui ont un effectif supérieur à 60 élèves et 308 avec un effectif supérieur à 40. Les cours complémentaires connaissent égale- ment une extension importante. Ils sont 17 en 1948 et accueillent 1509élèves. En 1958, le nombre d'établissements est de 30 pour un effectif qui a été multiplié par plus de 3,5. Du côté des écoles maternelles la situation est différente. Si les effec- tifs scolarisés sont passés sur la même période de 866 à 2849élèves et le nombre de classes de 8 à 55, ces établissements «n'ont pas encore connu leur plein déve- loppement»39. Sur le plan qualitatif, La Réunion dispose, à nouveau, depuis le 1er septembre 1958, d'une École Normale qui est annexée au lycée Leconte de Lisle dans l'attente de recevoir ses propres locaux. Trois nouvelles circonscriptions d'inspection primaire ont également été créées. De nombreuses actions de forma- tion sont dispensées à des maîtres munis pour le plus grand nombre du seul Bre- vet Élémentaire. La situation du secondaire est radicalement différente. En 1948, les deux lycées, Leconte de Lisle pour les garçons et Juliette Dodu pour les filles, fusionnent en un seul établissement mais en gardant les deux sites. En 1948, ces deux établissements scolarisent 857 élèves, puis 1544en 1958. Une augmentation considérable certes, mais un effectif dérisoire rapporté à l'ensemble de la popula- tion scolaire. Seuls un ou deux élèves des cours complémentaires peuvent donc espérer, sur concours, accéder en seconde au lycée. Pour les autres élèves des cours complémentaires méritants et désirant poursuivre des études secondaires, il leur faut continuer à emprunter la direction de Madagascar. Quand à l'enseignement technique, il est encore peu développé en 1958. L'île ne compte que deux centres d'apprentissages mixtes, l'un à Saint-Denis et le second à Saint-Louis. Ce dernier établissement est orienté essentiellement vers les métiers du bâtiment. Une enquê- te sur les retards scolaires dans le département menée en 1958-59 par le service de santé scolaire fait apparaître trois principales causes dans le primaire40.
- La scolarisation tardive arrive en première position, mais en mettant en rela- tion les pourcentages d'enfants tardivement scolarisés et les années de naissance correspondantes, on voit une amélioration sensible se produire, recoupant les créa- tions d'établissements et de classes effectuées à partir de 1952. L'absentéisme vient en deuxième position, se concentrant dans de nombreuses classes sur les mois de mars et de décembre, les incidences du climat malmenant la résistance physique des élèves. Pour les auteurs du rapport, «il n'est pas douteux que les carences et les déséquilibres alimentaires jouent ici un rôle considérable que la médiocrité extrême des cantines scolaires ne peut prétendre compenser»41.
- «L'inertie» est la troisième cause avancée. Elle est définie comme «liée à l'absence d'excitants intellectuels [...] dans ce département isolé aux débouchés limités»42.
Tirant un bilan de l'enseignement depuis la départementalisation, le Vice-rec- teur Cormary relève que «l'oeuvre de scolarisation intégrale dans des conditions matérielles normales est encore loin d'être achevée». Le Vice-recteur poursuit en notant que «l'effort considérable accompli en matière de constructions scolaires reste donc insuffisant et le gain des années antérieures risque d'être annihilé par l'accroissement massif de la population scolarisable dans les années à venir»43.
La politique volontariste du régime gaulliste, avec l'avènement, en 1958, de la Ve République, amène la deuxième déferlante. Si les écoles élémentaires conti- nuent dans la décennie 1960 à bénéficier d'une croissance très élevée avec une aug- mentation annuelle moyenne des effectifs de plus de 4 000 élèves, ce sont au tour des cours complémentaires, transformés en collège d'enseignement général (CEG) en 1960, de connaître une expansion considérable. Les effectifs passent de 5 420 élèves en 1958 à 6 738 en 1960 et à 8909deux ans plus tard. Une situation qui n'af- fecte pas dans le même mouvement le second cycle du secondaire. Il existe «un déséquilibre accentué» entre le premier et le second cycle. Une situation qualifiée de «préoccupante» par les Rapporteurs chargés de la préparation du Ve Plan44. Un déséquilibre encore plus profond apparaît à l'intérieur même du second cycle entre d'une part l'enseignement classique moderne et l'enseignement technique d'autre part. Pour les Rapporteurs: «la faiblesse des effectifs de l'enseignement technique est sans doute l'insuffisance la plus marquée de la situation scolaire [...]»45.
À partir de 1964, un nouveau lycée s'ouvre au Tampon et peut enfin accueillir les élèves du sud du département. En 1969, La Réunion compte alors 2500lycéens. En fait, durant toute cette période, c'est le Collège Saint-Michel de Tananarive qui reste le principal recours pour les jeunes du sud de La Réunion désirant accéder au baccalauréat. À partir de 1971, le développement du lycée du Tampon, puis la crise malgache vont entraîner la fermeture de cette filière. Initiée sous la colonie, elle aura survécu 25 ans à la loi de départementalisation. De 1967, année de la trans- formation des CEG en CES, à 1977, quand les CES deviennent des collèges, les effec- tifs accueillis sont passés de 17 700 élèves à 45 200, soit une hausse annuelle moyenne de 2800jeunes. Les transformations successives des cours complémen- taires, l'obligation scolaire jusqu'à 16 ans, le développement d'un réseau de collèges puis une ouverture laborieuse des lycées débouchent donc, dans le département comme sur le plan national, à une organisation en degrés et en cycles. En amont de toute cette organisation l'enseignement préscolaire reste embryonnaire tout au long du Ve Plan: «l'étroitesse des moyens de financement disponibles et le caractère abso- lument prioritaire des investissements à effectuer pour l'enseignement élémentaire obligatoire obligent à limiter, durant toute la durée du Plan l'effort d'équipement à réaliser au bénéfice de l'enseignement préscolaire»46. Il convient, en matière de classes de maternelles et enfantines, concluent les Rapporteurs au Plan, de «veiller seulement à éviter toute détérioration sensible du taux de scolarisation»47. C'est donc à partir de 1973 que démarre véritablement la préscolarisation. 18 724 élèves sont accueillis cette année là; quatre ans plus tard ils sont ... 26 566!
La croissance des effectifs reste importante dans la première partie des années 1980. Mais il reste cependant beaucoup à faire. A la veille de transformations insti- tutionnelles de plusieurs ordres, décentralisation, création d'un rectorat, mise en place du statut de région ultrapériphérique, seulement 39,4% des jeunes sortis de l'appareil scolaire ont accompli une scolarité complète de second cycle sanction- née ou non par un diplôme. Dans une étude publiée après qu'il ait quitté ses fonc- tions, le dernier Vice-recteur en poste dans l'île dresse «un constat de carence» du système éducatif à La Réunion. Un constat, poursuit le Vice-recteur Boyer, qui «interpelle tous les partenaires du système éducatif et leur fait obligation, à partir d'une analyse des données statistiques et de la connaissance des différents facteurs qui interfèrent dans le fonctionnement de "l'Ecole", de rechercher des mesures susceptibles d'induire une amélioration d'ensemble de l'efficacité de l'enseigne- ment de ce département»48.
Il nous faut maintenant tenter de fournir quelques éclairages à ces réalités et d'esquisser quelques questions qu'elles ne manquent pas de nous poser.
L'évolution de la scolarisation à La Réunion depuis 1946 n'est pas séparable de celle de la départementalisation. S'il nous faut nommer d'un mot cette évolution, celui de «révolution» s'impose. Cette évolution renvoie à une chronologie longue qui s'enracine dans le projet d'assimilation dont la départementalisation est l'abou- tissement. L'assimilation, c'est le droit commun, c'est-à-dire la fin de l'ordre colo- nial avec ses discriminations et exactions. C'est l'espérance de sortir d'une identité figée en élargissant le champ des possibles qu'autoriserait enfin le talent aux dépens de la naissance et donc aussi de la couleur.
De la rétrocession (1814) à la fin de la colonie (1946), il y a dans l'île deux ordres scolaires. Le primaire, longtemps confié aux congréganistes puis aux laïques, est un ordre constamment soupçonné et marqué par un développement chaotique. Il accueille les enfants de «la population flottante» et mène une petite minorité parmi les meilleurs au primaire supérieur puis quelques éléments d'exception au Cours normal. Quant aux enfants de la bourgeoisie, plutôt blanche, ils entrent dans l'ordre scolaire par les petites classes du prestigieux lycée Leconte de Lisle. Contrairement à l'ordre primaire, ce système d'excellence fait l'objet d'un soutien qui ne baisse jamais la garde. Le cursus proposé mène les lycéens au brevet de capacité colonial puis pour une bonne part d'entre eux vers des cycles universi- taires qui démarreront, pour les moins fortunés, à l'École de droit de la colonie, et pour les autres, plus aisés, ou boursiers, en France.
S'agit-il là, mais sur un mode plus dramatique, des deux ordres qui organisent jusqu'à la Seconde Guerre mondiale le système français d'enseignement? Répondre oui revient à, nous semble-t-il, nier la nature même du fait colonial et la spécifici- té de son enseignement. Quand en France l'organisation du système scolaire en ordres parallèles cède la place à un système de niveaux reposant sur une école unique (Prost, 1992), les réformes successives entreprises se déploient à La Réunion département français. On assiste alors à une systématisation de la scolarisation. A- t-elle participé à la démocratisation de l'Ecole à La Réunion? Plus de 30 ans après la loi de départementalisation et 13 ans après la réforme Berthoin, étape importan- te dans une chronologie courte et nationale de l'histoire de l'École, plusieurs ensei- gnements peuvent être établis.
Si, avec le passage de la IVe à la Ve République, le climat politique se modifie avec un gouvernement qui entend faire oeuvre de volontarisme et d'efficacité dans le domaine de l'enseignement, le mouvement de fond qui va révolutionner le sys- tème éducatif à La Réunion est antérieur à 1958. Une situation qui, pour être com- prise, demande à combiner, tant institutionnellement que politiquement, à l'échelon national que local, sur le plan des structures que des acteurs, plusieurs éléments. De 1948 à 1958, on assiste sur le plan national à un essor majeur des cours complémentaires. Ces établissements sont «faciles» à créer: la décision est locale, les moyens à mobiliser ne sont pas très élevés. Ils constituent pour les instituteurs une promotion et pour les élèves un espoir dans des établissements qui sont à proximité de chez eux (Briand et Chapoulie, 1992; Prost, 2001). Un processus qui vaut pour La Réunion mais rendu aisé par l'arrivée aux responsabilités, au sortir de la guerre, d'un personnel politique renouvelé, majoritairement issus du CRADS, soucieux de réussir la départementalisation afin de sortir La Réunion de l'ornière coloniale49. Différentes mesures sont prises, tant par le Conseil général que par les municipalités, concernant les locaux, les cantines scolaires, et même la prise en charge financière d'une partie des personnels: les monitrices communales. Participent également à cette dynamique le volontarisme de nombreux acteurs, membres ou non de l'institution éducative. Le mouvement coopératif, avec Mar- cel Le Guen, instituteur dans un village rural des hauts de l'île, mais porté surtout par Roger Ueberschlag, inspecteur primaire, nommé dans le Sud de La Réunion, en 1955, avec le soutien du Vice-recteur Cormary et, hors institution, les Écoles marron, sont significatifs de «l'esprit de l'époque»50. Au terme de la deuxième déferlante, qui demanderait également à être interrogée, toujours en croisant notamment histoire et sociologie des inégalités d'éducation dans leur enchevêtre- ment national et local, on peut néanmoins faire remarquer que l'organisation sco- laire s'est modifiée et que les barrières entravant l'accès à une scolarisation complète ont été supprimées.
C'est toute la société qui est concernée par les phénomènes scolaires et les interrogations qu'ils suscitent, ce qui ne signifie nullement que leur compréhen- sion soit aisée. Vraies pour le profane, qui à l'occasion ne manque pas de décou- vrir qu'il a été élève, ces difficultés de compréhension touchent aussi bien les politiques que les agents de l'institution et les chercheurs. Des difficultés qui s'ex- pliquent par la nature même des faits scolaires et des démarches qu'elles requiè- rent. En effet, tenter de comprendre les faits scolaires demande de les rapporter à des contextes larges pour interroger ensuite la manière dont les phénomènes, alors étudiés en situation, sont reliés. Une posture qui pose des questions épistémolo- giques et méthodologiques.
Des préoccupations qui ne sont pas spécifiques à la situation réunionnaise mais qui sont constitutifs, ici et ailleurs, de toute véritable démarche de recherche. Tou- tefois, il est vrai que par l'intensité des phénomènes concernés, leur temporalité, leurs différentes vitesses d'effectuation, la nature socioculturelle de l'île, les logiques contradictoires, et enfin la complexité des niveaux et systèmes d'apparte- nance, La Réunion offre une situation ... peu banale!
S'intéresser à l'École oblige à réfléchir sur les outils, les découpages, les notions, et les démarches que nous convoquons, explicitement ou non, pour la comprendre et la questionner. Non pour l'exalter ou la vilipender sauf à changer de registre et à quitter le domaine scientifique.
S'intéresser à l'École c'est donc également questionner la société où elle prend forme et se développe. Transformer une colonie en département français, ce n'est pas dissoudre les logiques, les tensions ou les contradictions de la société. Il y a des rapports étroits entre École et Société, entre pédagogique et politique. De plus, comme l'École est complexe et contrastée, elle ne produit pas d'effets uni- voques ni sous la colonie ni dans La Réunion, département français. En fait l'his- toire de l'École à La Réunion peut sans doute prétendre à une triple fonction. Elle enrichit l'histoire de l'École en France. Elle apporte également une contribu- tion importante à la connaissance des phénomènes de scolarisation. Elle témoigne enfin des Réunionnais eux-mêmes, donc de leurs aspirations, et de leurs choix.
1 Située à 800 km à l'Est de Madagascar, l'île de La Réunion (anciennement île Bourbon) fait partie de l'archipel des Mascareignes, qui comprend l'île Maurice (anciennement Isle de France) et l'île Rodrigues. Tout au long de son histoire, l'île Bourbon a changé à plusieurs reprises de nom, pour prendre définitivement celui de La Réunion à partir de 1848. Nous n'utiliserons indifféremment dans cet article que deux de ses appellations: Bourbon/La Réunion. D'une superficie de 2 512 km2, l'île Bourbon, qui est une île vierge est occupée de façon permanente depuis 1663. Bourbon, comme la Guadeloupe, la Guyane et la Martinique appartient donc au premier empire colonial français. Pour une première approche de l'histoire de La Réunion, se reporter à SCHERER, A.: La Réunion, Paris, PUF, 1992.
2 C'est la loi du 19 mars 1946 qui transforme les «vieilles colonies» -la Martinique, la Guadeloupe, la Guyane et La Réunion- en département français. Ces départements deviennent en 1983 des régions ultrapériphériques de l'Union Européenne, comme les îles espagnoles des Canaries et les îles portu- gaises des Açores et de Madère.
3 Voir nos différents travaux et notamment: LUCAS, R.: «Le développement de la scolarisation à La Réunion. Un cas d'école», in SI MOUSSA, A. (dir.): L'école à La Réunion, approches plurielles, Paris, Karthala, 2005. LUCAS, R.: Bourbon à l'école, 1815-1946, Saint-Denis, Océan Éditions, 2006. LUCAS, R. et RADOJCIC, K. (dirs.): L'enseignement supérieur dans les régions ultrapériphériques (Guadeloupe, Guyane, Martinique, La Réunion), Paris, Karthala, 2006.
4 Voir notamment: PLUCHON, P.: Histoire de la colonisation française , t. 1 : Le premier empire colo- nial (des origines à nos jours), Paris, Fayard, 1991. BOUCHE, D.: Histoire de la colonisation française, t. 2, Flux et reflux (1815-1962), Paris, Fayard, 1991. LUCAS, R. et SERVIABLE, M.: Commandants et gouver- neurs de l'île de La Réunion, Saint-Denis, Océan Éditions, 2008.
5 Sur toutes ces questions, les très nombreux travaux d'Hubert GERBEAU sont irremplaçables. Notamment: «Quelques aspects de la traite illégale des esclaves à l'île Bourbon au XIXe siècle», in Actes de l'ADHIOI, Paris, Champion, 1979; «Les traces de l'esclavage dans la mémoire collective des Masca- reignes», in Slavery in South West Indian Ocean, Île Maurice, Mahatma Gandhi Institute, 1987.
6 Voir notamment: MAESTRI, E. (dir.): Esclavage et abolitions dans l'Océan Indien, 1723- 1860, Paris, L'Harmattan, 2002.
7 Un libre de couleur est une personne de couleur née libre ou qui a été affranchie. Elle ne dispo- sera pas jusqu'en 1835 de la plénitude des droits dont dispose un membre de la population blanche. C'est après 1835 que, juridiquement, la catégorie des libres de couleur va disparaître, mais pas les préju- gés dont ils étaient jusqu'alors victimes.
8 Voir notamment: BOURQUIN, A.: Histoire des Petits-Blancs de La Réunion, Paris, Karthala, 2005 .
9 En 1735, l'Isle de France, colonie française depuis 1715, devient la métropole régionale des colo- nies françaises de l'Océan Indien. Une situation qui dure jusqu'en 1810, année où les Anglais s'empa- rent des colonies françaises de l'Océan Indien. En 1815, au terme de cette occupation, Bourbon est rendu à la France, alors que l'Isle de France devient colonie anglaise et prend désormais le nom d'île Maurice. Les Anglais gardent également l'île Rodrigues et l'archipel des Seychelles.
10 Voir LUCAS, R.: 2006.
11 Voir PRENTOUT, H.: L'Isle de France sous Decaen, 1803-1810, Paris, Hachette, 1901.
12 Voir PETITAT, A.: Production de l'École, production de la société, Genève, Droz, 1982.
13 Voir LUCAS, R.: 2005 et 2006.
14 Archives départementales, Procès verbal du Conseil colonial, séance du 9 décembre 1834.
15 A la fin de la Monarchie de Juillet, le système servile est condamné mais c'est la IIe République qui abolira l'esclavage, par décret, le 27 avril 1848.
16 Voir BOUCHE, D.: op. cit.
17 Ibid., p. 51.
18 BASTIDE, R.: Le proche et le lointain, Paris, Cujas, 1970, p. 25.
19 Voir LUCAS, R. et SERVIABLE, M.: op. cit.
20 Le Moniteur de La Réunion, 11 novembre 1870, 1PER/7.
21 Voir LUCAS, R.: op. cit., 2006, pp. 285-310.
22 Ibid. Elle est remplacée par un Cours normal.
23 Archives Départementales de La Réunion, L111-61.1.132, Rapport Gauthier.
24 Ibid.
25 Archives Départementales de La Réunion, Procès verbal du Conseil général, session 1905.
26 Archives Départementales 4111-61.1.132, Rapport Berger.
27 PROST, A.: Histoire de l'enseignement en France, Paris, Colin, 1968, p. 450.
28 Rapport Berger, op. cit. En 1848, le Collège Royal qui devient lycée, prend le nom de Lycée de La Réunion pour devenir Lycée Impérial en 1853 et prendre définitivement le nom de Leconte de Lisle en 1897.
29 RAMASSAMY, A.: La Réunion face à l'avenir, Saint-Denis, Cazal, 1972, p. 42. A Ramassamy est un Réunionnais d'origine indienne. Les Indiens sont venus à La Réunion comme travailleurs sous contrat, sur les propriétés sucrières, au milieu du XIXe siècle. A la fin de leur contrat, de très nombreux travailleurs indiens sont restés dans la colonie. Le «massalé» est une épice très utilisée dans la cuisine indienne. Instituteur, censeur, puis proviseur, A. Ramassamy occupera d'importantes fonctions syndi- cales avant d'être élu sénateur socialiste en 1984.
30 Rapport Berger, op. cit.
31 Rapport Gauthier, op. cit.
32 Voir LUCAS et SERVIABLE (2008) et JACQUEMART, S.: La question départementale Outre-mer, Paris, PUF, 1983.
33 JACQUEMART, S.: op. cit., p. 12.
34 Voir Rapport de l'Inspecteur Général Finance, document dactylographié, 1948.
35 Voir LUCAS, R.: «L'enseignement à l'aube de la départementalisation», Économie de la Réunion, n.° 42 (1989).
36 Archives départementales: 4111-41-1-133, Rapport du Vice-recteur Foucque.
37 Voir Bulletin Départemental de l'Éducation. Années 1951 et suivantes. Les statistiques qui sui- vent proviennent sauf mention express de ces Bulletins.
38 Paul Demange, premier préfet du département de La Réunion.
39 CORMARY, H.: «L'École», Richesses de France, Spécial La Réunion, n.° 45 (1960).
40 Service de santé scolaire et universitaire, Étude sur les retards scolaires à La Réunion, document dactylographié, 1959.
41 Ibid., pp. 24 et suivantes.
42 Ibid.
43 CORMARY, H.: op. cit.
44 Rapport général de la Commission centrale d'Outre-mer, Paris, Ministère de l'Outre-Mer, 1960, pp. 533 et suivantes.
45 Ibid.
46 Ibid.
47 Ibid.
48 BOYER, C.: «Une stratégie pour améliorer l'efficience du système éducatif réunionnais», Cenna- dom, n.° 72 (1984).
49 Comité Républicain Démocratique et Social, mouvement positionné à gauche de l'échiquier politique.
50 Le qualificatif «marron» accolé à une instance ou à une organisation signifie, dans le langage usuel à La Réunion, «hors de toute autorisation institutionnelle».
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Raoul LUCAS
Université de La Réunion
Correo-e: [email protected]
Recepción: 20 de septiembre de 2011. Envío a informantes: 22 de septiembre de 2011.
Fecha de aceptación definitiva: 15 de octubre de 2011
Biblid. [0212-0267 (2011) 30; 45-62]
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Copyright Ediciones Universidad de Salamanca 2011
Abstract
This paper analize the evolution of the colonialist French school policy in the island of Reunion, Indic Ocean, with a slave structure from the I Empire. Studies the first official efforts for the people schooling with the contribution of the religious congregations. Their proposal was the cultural assimilation. Later, the French Third Republic encreases secular assimilation policy. Finally, from 1946, the Reunion Island remains one of the first French empire, and begins to be administrative department of France, and remoteness becomes European territory. It concludes by studying the progress made in the first school, secondary and higher education, in the island of Reunion. [PUBLICATION ABSTRACT]
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