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The objective is to determine the dimensions of trust in a specific product category, drugs. The consumer's trust is based on five dimensions: reliability, innovation, information, credibility and social responsibility. These facets of trust are essential to redefine the current role of doctors when prescribing drugs and to compensate for the absence of a direct regulatory link between industry and patients. They also offer interesting ways to better integrate the monitoring of risks of the drug before and after market introduction. Finally, the results challenge the drug manufacturers on their lack of transparency and perceived deficit in social responsibility by offering suggestions for improvement.
Résumé
Cet article a pour objectif de déterminer les dimensions de la confiance dans une catégorie de produit particulière, le médicament. Cette confiance du consommateur s'articule en cinq dimensions : fiabilité, innovation, information, respect des règles et responsabilité sociétale. Ces facettes de la confiance sont essentielles à la redéfinition actuelle du rôle du médecin lors de la prescription et pour pallier l'absence réglementaire d'un lien direct entre industriels et patients. Elles offrent également des pistes intéressantes pour mieux intégrer le suivi des risques liés au médicament avant et après leur mise sur le marché. Les résultats obtenus permettent aussi d'interpeller les industriels du médicament sur leur manque de transparence et leur déficit en matière de responsabilité sociétale, en proposant des pistes d'améliorations possibles.
Mots-clés : comportement du consommateur, confiance, catégorie de produit, industrie pharmaceutique, médicament.
Abstract
Consumer trust as a multidimensional construct: The case of drugs
The objective is to determine the dimensions of trust in a specific product category, drugs. The consumer's trust is based on five dimensions: reliability, innovation, information, credibility and social responsibility. These facets of trust are essential to redefine the current role of doctors when prescribing drugs and to compensate for the absence of a direct regulatory link between industry and patients. They also offer interesting ways to better integrate the monitoring of risks of the drug before and after market introduction. Finally, the results challenge the drug manufacturers on their lack of transparency and perceived deficit in social responsibility by offering suggestions for improvement.
Key words: consumer behavior, trust, product category, pharmaceutical industry, drug.
L'actualité a remis sur le devant de la scène l'importance de la confiance dans un produit singulier : le médicament. La crise du Médiator, la loi Bertrand sur la sécurité des produits de santé, ainsi que la création de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) en remplacement de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS) témoignent des enjeux sanitaires, politiques et managériaux liés à la confiance dans le médicament.
Les crises retentissantes et les réponses apportées par les entreprises privées comme par le gouvernement soulignent les difficultés rencontrées pour maintenir la confiance des consommateurs dans le médicament. Pour mieux comprendre ces questions, il est important de replacer le médicament dans son contexte industriel, entre les logiques de rentabilité des grands groupes pharmaceutiques et les enjeux sanitaires des populations, entre sa production de masse et son administration individuelle par un médecin de famille. Ces effets d'échelles rendent difficile la possibilité de se contenter des dimensions habituelles et des échelles de mesure standardisées pour comprendre la confiance dans le médicament, au risque de conclusions incomplètes.
La confiance constitue en effet un champ de recherche particulièrement vaste, et plusieurs centaines de définitions ont été proposées dans des disciplines et des écoles de pensée variées. Ebert (2009) révèle que plus de 800 articles sur la confiance ont été publiés dans des revues académiques entre 1966 et 2006. Il note une absence de consensus sur les structures et les dimensions de la confiance ainsi que l'existence de 13 types de conception de la confiance rien qu'en comportement du consommateur. Il en résulte que la confiance est un construit difficile à conceptualiser et à opérationnaliser et qu'elle est fortement contextuelle. Même sur le plan sémantique, différents mots cohabitent chez les anglo-saxons qui utilisent les termes de trust, de confidence et de reliance pour évoquer la confiance.
En s'appuyant sur l'apport de la littérature et sur une analyse typologique des résultats d'une enquête nationale, cet article a donc pour objectifs d'identifier les dimensions de la confiance dans le médicament et les éléments constitutifs du construit, puis d'en proposer une modélisation. Sur le plan managérial, il permet de mieux gérer l'intermédiation du médecin, de pallier l'absence de communication directe entre entreprise et patient et de faciliter l'intégration du suivi des risques liés au médicament.
La confiance dans le médicament : un cas singulier
Le médicament souffre d'un paradoxe au coeur de la confiance, tiraillé entre la noblesse de la mission de sauver des vies et de multiples suspicions. D'un côté, les travaux récents des économistes de la santé tendent à confirmer ce que tout le monde subodore intuitivement : le médicament contribue à l'augmentation de l'espérance de vie en bonne santé. De l'autre, diverses publications font état d'une crise du système de santé français et de son pacte social, de crises du médicament lors de la survenue d'effets secondaires inconnus (Perez, 2008) et de défis à relever par l'industrie pharmaceutique (Navarro, 2009). Par ailleurs des travaux américains (Pesse, 2007) notent une dégradation nouvelle de l'image du médicament et un climat de suspicion et de perte de confiance. D'autres (Gausz-Mandelberg, 2006) évoquent des égarements de conduite et des dérives de communication.
Tous les jours, les médias annoncent une nouvelle crise : retrait d'un médicament, limitation de ses indications, mauvaise communication des effets secondaires, conflits d'intérêt avec les médecins, publicité trompeuse, mauvaise application de la réglementation, et au niveau des entreprises baisse de la recherche et des cours de bourse, pollution, profits, etc. (Navarro, 2009).
La confiance des patients dans le médicament en ressort ébranlée, comme le laisse entendre le rapport « Restaurer la confiance » publié en 2006 par la mission d'information sur les conditions de mise sur le marché et de suivi des médicaments créée par le Sénat. Les 25 recommandations formulées répondent aux différents enjeux évoqués précédemment, de la collusion entre l'industrie pharmaceutique et l'évaluation des médicaments à la transparence des agences sanitaires.
Si confiance et méfiance sont étroitement liées, c'est avant tout parce que le médicament « n'est pas un bien de consommation comme tous les autres » (Perez, 2008, p.58), il est un produit socialement complexe. Les entreprises du médicament (www.leem.org) incluent ainsi les dimensions suivantes dans leur définition du médicament : un produit de consommation particulier (autorisation de mise sur le marché, rapport bénéfices/risques, dispensation en officines), une recherche de haut niveau, une information obligatoire (notice obligatoire, informations des professionnels...), une industrie soumise à une réglementation et des règles strictes, et des entreprises intégrant des préoccupations sociétales (environnement, santé publique...).
Dans cette étude, nous souhaitons mesurer une confiance générale à une catégorie de produit et non à un médicament en particulier. Il est donc nécessaire d'intégrer, dans une perspective managériale, les différents niveaux de la confiance dans le médicament.
Il s'agit avant toute chose de mieux comprendre la nature même de la confiance dans le médicament si l'on souhaite pouvoir proposer des actions précises et efficaces dans une perspective de restauration de la confiance à long terme.
La nature de la confiance
La première difficulté réside dans le fait que la nature de la confiance varie selon les disciplines. En économie, la confiance relève du domaine du comportement (actes, actions de faire confiance et de prendre un risque) alors que pour les psychologues, les psychosociologues, les sociologues et les théoriciens du comportement du consommateur, elle est cognitive et affective (encadré 1).
Si l'on suit l'approche comportementale des économistes, la confiance dans le médicament doit être considérée comme une anticipation du comportement (Williamson, 1975). Elle est le résultat d'un calcul plus ou moins rationnel et opportuniste (confiance stratégique, rationnelle, réfléchie, calculée, opportuniste) pour maximiser ses gains. Dire « je fais confiance au médicament » signifie dans ce cas « le médicament répond à mes besoins, à mes intérêts ». Il s'agit d'un intérêt incorporé. Cette approche est importante pour rendre compte du rôle du médecin dans la construction de la confiance dans le médicament. Le médecin est en effet celui qui est capable de mettre en balance les bénéfices et les risques du médicament lors de la prescription à un patient (Perez, 2008). La confiance dans le médicament passe donc ici par l'intermédiation du médecin prescripteur, mais également par la confiance dans l'évaluation des caractéristiques et des effets du médicament. Or, il existe des conflits d'intérêts entre les médecins et les laboratoires pharmaceutiques (Perez, 2008) ; et le schéma classique entre le médecin qui prescrit, le pharmacien qui délivre et le patient qui suit leurs conseils, a tendance à se complexifier et à laisser la place à des réseaux et des comportements plus diversifiés (Pesse, 2007). Une meilleure compréhension de la confiance dans le médicament qui suivrait une approche comportementale pourrait permettre d'apporter des réponses à ces enjeux importants.
L'approche cognitive adoptée par la psychologie et la sociologie (Larzelere et Huston, 1980 ; Quere, 2006) nous permet d'aller au-delà du simple rapport risques/bénéfices et aide à appréhender la confiance dans le médicament comme relevant du domaine des croyances et des éléments de connaissances entretenues à l'égard du partenaire. Dire « je fais confiance au médicament » signifie dans ce cas « je crois que le médicament est digne de confiance ». Cette croyance fait référence aux compétences et aux intentions du médecin, à celles du laboratoire pharmaceutique et par extension au médicament. Les compétences les plus souvent prises en compte sont la fiabilité, le savoir-faire, la qualité et la réputation (le côté performant du partenaire). Les intentions (les bonnes intentions) concernent les engagements à tenir parole comme l'intégrité, l'honnêteté, la loyauté ou l'altruisme (le côté pragmatique du partenaire). Dans le contexte d'une production de masse et des intérêts de rentabilité à grande échelle des laboratoires, l'approche cognitive de la confiance dans le médicament peut nous apporter une perspective intéressante. Au-delà de ces aspects cognitifs immédiats, la confiance peut aussi s'appuyer sur un sentiment général qui porte à espérer et une prédisposition à voir réaliser ce que l'on désire (Quere, 2006). Cette composante apparaît comme essentielle pour mieux comprendre la confiance dans le médicament, au vu de la nature du produit. La prise de médicaments est censée améliorer la santé et l'ingurgitation de cachets et pilules illustre le rapport intime au corps, source de tensions entre l'espoir d'être soigné ou d'améliorer sa santé, et le risque d'effets secondaires qui conduisent chaque année à plusieurs centaines de décès et plusieurs milliers de complications médicales importantes (Perez, 2008).
Des recherches en comportement du consommateur (Bartikowski, Chandon et Müller, 2010 ; Cissé-Depardon et N'Goala, 2009 ; Gurviez et Korchia, 2002 ; Sirieix et Dubois, 1999 ; Swaen et Chumpitaz, 2008) considèrent la confiance comme un système de croyances et d'attentes, composé de facettes. La nature de la confiance est considérée ici comme à la fois cognitive et affective (Gurviez et Korchia, 2002 ; Johnson et Grayson, 2005). Les facettes identifiées incluent la compétence et la crédibilité (qualité, qualification, capacités techniques, savoir-faire), l'intégrité (honnêteté, loyauté, valeurs) et la bienveillance (bonnes intentions, tenir parole, orientations vers les autres, altruisme). Elles sont essentielles dans notre démarche qui vise à identifier les dimensions de la confiance et à inclure à la fois les approches cognitive et affective.
Les dimensions de la confiance dans le médicament
Si la démarche est inspirée des travaux en comportement du consommateur, l'approche théorique vise à introduire les nouveaux raisonnements des sociologues sur la confiance (Quere, 2006) et ceux des chercheurs en comportement du consommateur (Bartikowski, Chandon et Müller, 2010). Il ne s'agit pas ici d'évaluer la confiance à un produit bien précis, ni à une marque de médicament ou une marque d'entreprise du médicament spécifique, mais d'évaluer la confiance dans le médicament en général.
Afin de pouvoir mieux comprendre la confiance dans le médicament, il est alors essentiel de prendre en compte les différentes approches développées, et de les intégrer dans l'identification de dimensions distinctes de la confiance dans le médicament. Si au départ les chercheurs en sciences sociales (Larzelere et Huston, 1980) ont mis en évidence une seule dimension de la confiance (une seule facette mesurée par plusieurs variables), très vite un consensus s'est établi autour de deux ou trois dimensions.
En comportement du consommateur (encadré 2), la confiance a été modélisée autour d'une à quatre dimensions (Ebert, 2009). Les développements qui précèdent nous conduisent à considérer que les trois dimensions traditionnellement mobilisées dans ce cadre sont insuffisantes pour représenter la confiance dans un produit aussi socialement complexe que le médicament. Si l'on retrouve, bien que dotées d'un contenu plus large, la compétence, l'intégrité et la bienveillance, deux nouvelles dimensions, intégrant l'innovation et l'information, apparaissent dans la littérature professionnelle. Notre conception de la confiance est donc très cohérente avec la définition managériale du médicament. Elle peut être représentée par un modèle en cinq dimensions : fiabilité, investissement dans l'innovation, transparence de l'information, crédibilité des acteurs, responsabilité sociétale (encadré 3). Cette structure a été validée par des entretiens qualitatifs, menés à l'occasion des semaines du médicament 2007 et 2008, et un jury d'experts (académiques et professionnels).
Dimension « Fiabilité du médicament »
La dimension fiabilité évalue la confiance dans la qualité du produit, de ses effets thérapeutiques et de son rapport bénéfice/risques. Pour le médicament, on peut penser que c'est la dimension fondamentale qui a le plus fort impact sur la confiance globale.
Elle reprend en les adaptant les trois items de l'échelle de confiance compétence/cré- dibilité en comportement du consommateur (Cissé-Depardon et N'Goala, 2009 ; Gurviez et Korchia, 2002 ; Sirieix et Dubois, 1999 ; Swaen et Chumpitaz, 2008) : qualité (des médicaments et des médicaments génériques), garantie d'un produit pas comme les autres, sécurité de l'autorisation de mise sur le marché.
Elle introduit en plus deux notions de sécurité (en notation inversée), l'une sur le rapport bénéfices/risques (effet thérapeutique et effets secondaires) et l'autre sur le mode de distribution. Nous avons nommé cette dimension « fiabilité » plutôt que « compétence » car elle convient mieux aux caractéristiques d'un produit. De même, la crédibilité renvoie à l'expertise d'une personne plutôt qu'aux attentes fonctionnelles à l'endroit du médicament.
Dimension « Investissement dans l'innovation »
La dimension innovation est une autre facette importante du médicament et de sa confiance : sans progrès thérapeutique et sans financement de la recherche, il n'y a pas de médicaments.
Son évaluation dans les échelles de confiance en comportement du consommateur porte sur la bienveillance (Cissé-Depardon et N'Goala, 2009 ; Gurviez et Korchia, 2002 ; Sirieix et Dubois, 1999 ; Swaen et Chumpitaz, 2008), c'est-à-dire les bonnes intentions des entreprises du médicament et leur volonté de faire tout ce qui est possible pour soulager les patients et améliorer leur santé. Elle est mesurée habituellement par les deux critères de « recherche continue de nouveaux produits » et « priorité accordée à la recherche ». Ces variables ont été intégrées dans notre modèle en les adaptant et en y ajoutant les spécificités de la recherche sur les médicaments : une recherche incrémentale, encadrée et risquée. Il s'agit d'une dimension innovation plutôt que de bienveillance (on est bienveillant à l'égard d'une personne et non d'un produit) avec des enjeux de recherche « investissement dans l'innovation ».
Dimension «Transparence de l'information »
La dimension information représente la troisième composante de la confiance dans le médicament. Il n'y a pas de médicament sans communication sur ses propriétés thérapeutiques et les innovations qu'il apporte. L'information fait partie intégrante du médicament à travers la notice (information obligatoire dans les boîtes de médicaments), l'actualisation des connaissances sur les effets thérapeutiques, les recommandations de bon usage, l'information sur les essais cliniques et les informations institutionnelles données par les autorités et les professionnels de la santé.
Sur le plan théorique, la dimension information n'existe pas dans les échelles de confiance en comportement du consommateur. Cependant, selon Ebert (2009), c'est la deuxième variable la plus étudiée en recherche sur la confiance, après la variable performance et juste avant la variable engagement. Elle est justifiée dans le cas du médicament par le concept de confiance calculée des économistes (Williamson, 1975) ou de confiance décidée des sociologues (Luhmann, 2001), qui conduisent en cas de risque à rechercher des informations. L'objet est d'incorporer la composante information de la confiance engagée comme une des dimensions de la confiance dans le médicament (Pesse, 2007) face au climat de suspicion qu'il peut susciter.
Le terme de « transparence » utilisé pour qualifier l'information vise à explorer une des sources de méfiance les plus importantes sur le médicament. Cela est d'autant plus important que l'information sur le médicament est difficilement accessible. La Commission Européenne a ainsi proposé un projet de directive au parlement européen sur l'information non publicitaire des médicaments de prescription.
Dimension « Crédibilité des acteurs »
La dimension « Crédibilité des acteurs » fait partie traditionnellement des échelles de confiance en comportement du consommateur, même si elle n'en porte pas toujours le nom : dimension intégrité (Cissé-Depardon et N'Goala, 2009 ; Gurviez et Korchia, 2002 ; Swaen et Chumpitaz, 2008) et dimension crédibilité/honnêteté (Sirieix et Dubois, 1999).
En ce qui concerne le médicament, l'honnêteté et la sincérité ne peuvent pas être évaluées vis-à-vis d'un seul partenaire (la marque ou l'entreprise) mais de plusieurs, non seulement les médecins prescripteurs, mais aussi les autorités de santé, les payeurs et les experts. C'est même vis-à-vis de ces acteurs qu'elles ont été remises en cause par certains auteurs (Navarro, 2009 ; Perez, 2008) et qu'elles semblent pour certains une source de méfiance (Gausz-Mandelberg, 2006). De plus, le médicament étant un bien encadré, la loyauté s'exprime vis-à-vis de ces acteurs autant en termes de respect de la réglementation que d'attitude dans la relation. Il est donc préférable de parler de crédibilité des acteurs pour désigner cette dimension.
Dimension « Responsabilité sociétale des acteurs du médicament »
La dimension « responsabilité sociétale de l'entreprise » évalue la confiance dans une relation saine et durable avec les entreprises du médicament, dans leur capacité à s'investir dans des échanges pérennes et équitables, et dans leur aptitude à tenir leurs promesses.
Dans les échelles de confiance en comportement du consommateur, la dimension de bienveillance ou de bonnes intentions (Gurviez et Korchia, 2002 ; Swaen et Chumpitaz, 2008) intègre à l'origine l'idée d'une relation durable et celle d'un intérêt à long terme pour le consommateur sous la forme de deux items. Pour ce qui est du médicament, cette notion mérite une dimension plus complète.
En effet, un des reproches majeurs qui est fait aux entreprises du médicament est de privilégier le court terme et leurs intérêts immédiats au détriment du long terme et des patients (Navarro, 2009 ; Perez, 2008). Sur le plan théorique, Ebert (2009) note que la collaboration et la coopération font partie des dix variables les plus étudiées en recherche sur la confiance toutes disciplines confondues, même s'il ne s'agit pas encore de responsabilité sociétale d'entreprise (RSE), concept trop récent pour la période de l'étude (1966 à 2006). Les travaux de Swaen et Chumpitaz (2008), en comportement du consommateur, ont montré les liens entre confiance et RSE. La démarche a pour but d'enrichir une dimension de la confiance, la confiance sociale (Quere, 2006), et non de faire de la RSE un construit à part et d'en mesurer les liens. Elle est inspirée des travaux sur la communication citoyenne (Andreani et alii, 2008).
Validation des échelles de mesure
Dans une première phase exploratoire, la dimensionnalité des échelles a été mesurée et la coïncidence de chaque dimension avec les construits étudiés, validée. Le modèle se structure de façon statistiquement satisfaisante et révèle une structure factorielle stable après épuration de certains items. La fiabilité des facteurs est satisfaisante, compte-tenu des coefficients calculés, et l'alpha de Cronbach est supérieur à 0,80 pour toutes les dimensions, ce qui est conforme aux standards habituels (voir annexe).
Une analyse factorielle confirmatoire a ensuite été réalisée à l'aide du logiciel AMOS. Les qualités psychométriques (tableau 1) d'un niveau satisfaisant sont confirmées : les contributions factorielles standardisées sont significatives et comprises entre 0,586 et 0,879 ; les coefficients de fiabilité (p de Jöreskog) sont compris entre 0,807 et 0,876 ; ceux de validité convergente (pvc) entre 0,538 et 0,639.
La validité discriminante est établie si deux construits différents théoriquement sont bien distincts empiriquement, en d'autres termes si les corrélations entre deux construits sont inférieures à la racine carrée de leur p . C'est le cas ici (tableau 2).
Le tableau 3 résume les évaluations obtenues pour chaque dimension.
Ces résultats, notamment les 74% de confiance dans la fiabilité du médicament, concordent avec ceux obtenus dans les études IPSOS (82% de confiance globale en 2011 et 87% en 2013, http://www.ipsos.fr/ipsos-marketing/). Ces scores sont comparables, bien que nous mesurions la confiance à partir d'une échelle multidimensionnelle (McKnight, Choudhury et Kacma, 2002 ; Gurviez et Korchia, 2002), et non à partir d'un indice global. Ces résultats confirment donc la structure multidimensionnelle, en cinq dimensions, de la confiance dans le médicament.
Analyse typologique
Afin de compléter la réponse aux hypothèses retenues, une analyse typologique exploratoire selon la méthode des distances euclidiennes de Ward a été menée à l'aide des scores factoriels des cinq dimensions de l'échelle.
L'analyse des résultats porte à la fois sur les dimensions de la confiance dans le médicament et sur les réactions qu'elles induisent. L'analyse typologique montre des réponses en bloc sur les items. Trois groupes de réponses apparaissent : un groupe de réponses positives (supérieures à 4/6) sur l'ensemble des items, un groupe de réponses inférieures à 4/6 pour toutes les dimensions et un groupe de réponses mixtes (supérieures à 4/6 sur deux dimensions et inférieures à 4/6 sur trois dimensions). L'analyse met en évidence que la confiance dans le médicament est partagée entre une confiance sereine et complète (29,8% des répondants), une confiance inquiète et partielle (40,9%) et une attitude de non-confiance (29,3%) et de méfiance (tableau 4).
Ces trois groupes ne font pas apparaître de différences significatives en termes de répartitions par sexe, CSP, existence et type de maladie et origine géographique. Seul le groupe 1 (confiance sereine) montre un profil légèrement plus jeune (catégories des 20/34 et 35/49 ans) et le groupe 2 (confiance partielle) un profil légèrement plus âgé (65 ans et plus).
La confiance sereine est une confiance totale et inconditionnelle sur tous les critères. Elle se traduit par un sentiment général qui porte les consommateurs à croire aux performances du médicament. A l'inverse du groupe précédent, et quels que soient les items, les consommateurs présentant une attitude de méfiance donnent des notes inférieures à 4. Ils n'ont pas confiance dans le médicament. En particulier, ils se méfient de ce que peuvent en dire autant les autorités de santé, le Ministère de la santé, que les médecins ou les pharmaciens, et encore plus les médias et Internet.
Entre ces deux attitudes opposées, confiance sereine et méfiance, un troisième groupe de répondants se positionne dans une confiance inquiète. Ces consommateurs « inquiets » font confiance au médicament sur la facette fiabilité et qualité (les capacités techniques, les savoir-faire), sur la facette innovation (recherche encadrée, incrémentale, risquée, autofinancée) et sur les bonnes intentions en matière d'innovation (recherche continue de nouveaux produits, priorité accordée à la recherche).
Ils sont en revanche moins confiants quant à la transparence de l'information, la crédibilité et la responsabilité sociétale des acteurs que les membres du premier groupe. Avant de s'engager dans une relation, ces consommateurs souhaitent rechercher des informations et des garanties afin de valider leurs raisons de faire confiance.
Discussion, implications et limites de la recherche
Cette étude confirme l'hypothèse qu'il existe une confiance générale à un produit, le médicament.
Il est possible de proposer une modélisation de la confiance dans le médicament, constituée des cinq dimensions suivantes : la fiabilité, l'innovation, l'information, le respect des règles et la responsabilité sociétale. Ces dimensions illustrent les deux sources de la confiance dans le médicament : fiabilité et innovation se rattachent plutôt à la confiance dans le produit et information, tandis que respect des règles et responsabilité sociétale font plutôt référence à la confiance dans l'entreprise.
La confiance dans le médicament s'exprime par une importance différente de ces cinq dimensions en fonction des groupes de consommateurs identifiés. Pour le groupe de confiance inquiète, la confiance dans le médicament s'exprime sur les dimensions fiabilité et innovation alors que la méfiance porte sur les fabricants, la chaîne d'information à laquelle ils participent, le respect des règles qu'ils appliquent et le rôle sociétal qu'ils jouent. Pour les groupes confiance sereine et méfiance, la confiance repose à la fois sur la fiabilité du produit et sa capacité d'innovation et sur le respect par son fabricant des règles, de l'environnement et de l'information.
Cette recherche accrédite donc l'hypothèse que la confiance dans le médicament peut être représentée par un modèle à cinq dimensions conceptuellement et métriquement distinctes, reliées entre elles. Elle apparaît donc comme un concept complexe comprenant plusieurs composantes cognitives et affectives.
Nous constatons que la confiance s'exprime d'abord au travers du produit par l'intermédiaire de deux facettes : la fiabilité du médicament et la recherche. La première est décrite par trois items, qui reprennent en les adaptant les trois critères de l'échelle de confiance de Gurviez et Korchia (2002) : deux items de qualité (qualité des médicaments, qualité des génériques) et un item de garantie (sécurité de l'autorisation de mise sur le marché). La confiance dans l'innovation est évaluée sur quatre items répartis en deux groupes : la facette efforts de recherche (la facette bienveillance et ses deux items dans l'échelle de Gurviez et Korchia) et la facette spécificité de la recherche propre au médicament (une recherche encadrée, incrémentale).
Trois autres facettes sont plus directement liées à l'action de l'entreprise : l'information, le respect des règles et la responsabilité sociétale. La confiance dans l'information a été mesurée par trois items, sur les neuf de départ, qui représentent une facette confiance dans l'information sur le produit (la notice et l'actualisation de l'information en temps réel). Il est à noter que les sources d'information (Internet, médias) obtiennent des scores de confiance très faibles (moyenne 1,3/6) et n'ont pas été retenues à l'issue de la phase exploratoire (ACP).
Les deux dernières dimensions concernent le respect des règles et la responsabilité sociétale. Les travaux en comportement du consommateur (Gurviez et Korchia, 2002 ; Sirieix et Dubois, 1999) ont montré que la dimension loyauté (ou honnêteté, intégrité) était une des dimensions de la confiance. Dans notre recherche, la facette loyauté s'exprime vis-à-vis des partenaires du médicament (les médecins, les pharmaciens, les autorités de santé) et non vis-à-vis des consommateurs (les médicaments de prescription ne peuvent pas s'adresser directement au consommateur en Europe). Elle est composée de trois items (respect des obligations d'information, de l'indépendance des experts et des réglementations imposées par les pouvoirs publics).
La dimension responsabilité sociétale de la confiance qui était, avant l'ACP, explorée par six items, n'en contient plus que quatre. Elle est composée de deux facettes, une facette entreprise citoyenne (rôle de santé publique, de bon usage, réduction de l'inégalité d'accès aux soins, recherche sur les maladies rares) et une facette développement durable (produits non utilisés). Seulement 41,9% des consommateurs ont confiance dans les laboratoires pharmaceutiques en tant qu'entreprises citoyennes et actrices de développement durable.
Nos résultats offrent d'intéressantes implications managériales. Mieux comprendre les facettes de la confiance dans le médicament est tout d'abord essentiel pour aider à la redéfinition actuelle du rôle du médecin et de ses marges de liberté lors de la prescription. Le patient ne possède en effet pas une information complète sur les médicaments, et sa décision de recourir à un produit en particulier relève d'une croyance sociale qui passe par l'inférence de son médecin prescripteur. Elément essentiel de la confiance dans le médicament, véritable lien entre l'industrie pharmaceutique et le patient, le médecin voit sa place sensiblement modifiée par la nouvelle Loi sur les médicaments, qui interdit toute prescription d'un médicament pour une pathologie différente de celle pour laquelle l'autorisation de mise sur le marché a été reçue ; pratique qui représente aujourd'hui entre 15 et 20% des prescriptions. Mieux intégrer les différentes dimensions de la confiance confirme l'importance cruciale de l'intermédiation du médecin dans la définition du couple bénéfices/risques, qui doit aller au-delà de la seule dimension de la fiabilité. La Caisse Nationale d'Assurance Maladie (CNAM) gagnerait certainement à intégrer cette démarche dans sa politique de remboursement des médicaments.
De plus, comme les laboratoires pharmaceutiques n'ont pas le droit de communiquer avec les consommateurs sur les médicaments de prescription, développer un climat de confiance est le seul moyen qu'il leur reste pour accroître l'adhésion au traitement et favoriser le bon usage de la prescription. La confiance dans le médicament représente une source de dynamisation, d'implication et d'engagement des patients. En même temps qu'elle facilite l'observance, elle améliore la réputation des produits d'une façon générale.
Notre étude offre également des pistes intéressantes pour mieux intégrer le suivi des risques liés au médicament avant et après leur mise sur le marché. L'Agence du Médicament Européenne (AME) comme l'ANSM devrait intégrer les cinq dimensions identifiées de la confiance dans les dossiers d'évaluation des médicaments, et non se satisfaire du seul rapport bénéfices/risques. Cette réflexion permettrait de renforcer la valeur médicale du médicament et non pas seulement sa valeur économique. De la même façon, nos résultats vont dans le sens d'une amélioration du dispositif de remontée des effets secondaires des médicaments offerts sur le marché qui ne prend pas en compte la totalité des dimensions de la confiance dans le médicament. Ce n'est qu'à ce prix que la confiance des consommateurs pourra être pleinement restaurée.
Notre recherche est enfin en mesure d'interpeller les industriels du médicament, notamment à propos des doutes qui s'expriment sur la transparence de l'information et sur la responsabilité sociétale. Même si leur association revendique une confiance des Français de 87% (IPSOS, 2013), ils ont revu leur copie en 2011 en créant le Comité Déontologique des Entreprises du Médicament (CODEEM) pour régler les questions d'éthique qui leur sont posées en matière de communication et de promotion.
Les limites de ce travail tiennent essentiellement à la posture exploratoire de la recherche dont les résultats devront être confirmés, en particulier en ce qui concerne la structuration des nouvelles dimensions de la confiance. La vérification de l'attribution médicament/ laboratoire (produit/marque) pourrait notamment permettre de conforter nos résultats. Au vu de la complexité du produit médicament et du contexte d'actualité des crises qui se succèdent, il semble utile notamment de procéder à une étude similaire dans quelques années afin de comprendre l'évolution temporelle dynamique de ces cinq dimensions et du degré de confiance des consommateurs. L'échantillon, lui-même, s'il est de taille importante, comporte certains biais dus au mode de recueil sur Internet et aux effets de halo que peut entraîner un questionnaire auto-administré. Par ailleurs, être ou non malade, un patient chronique ou non, autant que l'âge, le sexe ou la CSP pourraient constituer un effet modérateur qui n'a pas été vérifié dans cette étude. D'autre part, comme il a été déjà souligné, le secteur de la santé n'est pas représentatif de l'ensemble des catégories de produits mais seulement de certains produits complexes. Une prochaine phase consistera à valider ce nouveau construit pour d'autres catégories de produits de même nature ou de nature proche.
Conclusion
Cette recherche identifie et valide les dimensions de la confiance d'une catégorie de produit particulière, le médicament, et en précise les composantes. Cinq dimensions permettent de définir et de mesurer cette confiance : la fiabilité, l'innovation, l'information, le respect des règles et la responsabilité sociétale. Elles convergent dans une confiance générale dans le médicament qui résulte d'une double origine, le produit et l'entreprise qui le fabrique. Les résultats obtenus montrent une prééminence fréquente du premier sur la seconde. Toutefois, celle-ci n'est pas absolue et dépend largement des attitudes générales du consommateur envers le médicament. Une analyse typologique, fondée sur cette structuration de la confiance, permet d'identifier trois groupes distincts de consommateurs (à confiance sereine, à confiance inquiète et à méfiance générale) pour lesquels la hiérarchie des composantes diffère. La mise en évidence de ces différences ouvre des perspectives managériales intéressantes pour une gestion équilibrée de la relation au consommateur. Les rôles de l'information et de la responsabilité sociétale des entreprises, dans la construction d'une confiance globale et durable envers le médicament, sont en particulier soulignés.
(a) Travaux réalisés en collaboration avec Les Entreprises du Médicament LEEM et le site Internet Doctissimo, dans le cadre de la Chaire Marketing-Communication, ESCP Europe, 79 Avenue de la République - 75543 Paris Cedex 11 - France - tél. 33 (0)1 49 23 22 49
Références
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Jean-Claude Andreani*, Jean-Louis Moulins**, Françoise Conchon***, Cendrine Fons**** et Benjamin Boeuf*****
*Professeur Émérite ESCP Europe
** Professeur Aix-Marseille Université, CRET-LOG
*** Directeur d'Etudes, Institut Insemma
**** Maître de Conférences Aix-Marseille Université, CRET-LOG
***** Candidat au Ph.D., HEC Montréal
Pour contacter les auteurs : [email protected], [email protected], conchon@insemma. corn, [email protected], [email protected]
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