En 1961, François de Sainte-Marie publie les quarante-sept photographies du carmel de Lisieux sur lesquelles figure Thérèse de l'Enfant-Jésus (1873-1897). L'ouvrage intitulé Visage de Thérèse de Lisieux 1 se veut représentatif des photographies faites du vivant de la sainte dans l'enceinte du carmel. Les portraits, et les portraits de groupe, représentant Thérèse de l'Enfant-Jésus y sont discutés du point de vue théologique, en répondant au débat sur leur authenticité et à une recherche du « vrai visage » de la carmélite, plutôt qu'aux caractéristiques techniques et sociales d'une pratique photographique en milieu conventuel. Les photographies sont ainsi valorisées en raison d'un de leurs modèles, et chaque portrait de la publication est introduit par un recadrage et un agrandissement autour du visage de Thérèse de l'Enfant-Jésus. À la suite de François de Sainte-Marie, plusieurs publications ont envisagé à nouveau ces portraits, sans s'intéresser à la globalité du fonds photographique du carmel de Lisieux qui demeure aujourd'hui inconnu. En 1995, cette lacune a pu conduire Marion Lavabre à évoquer, en se basant sur ces seules quarante-sept photographies, une stratégie de promotion et de canonisation anticipée de Thérèse de l'Enfant-Jésus 2 .
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Fig. 1. C. Martin, « Marie-Ange, le jour de sa prise d'habit », négatif verre au gélatino-bromure d'argent, 13 x 18 cm, 20 novembre 1902, coll. Archives du carmel de Lisieux.
C'est en se rendant à Lisieux même, et en prenant conscience de l'étendue du fonds photographique du carmel que le doute survient quant à la singularité des portraits photographiques de Thérèse de l'Enfant-Jésus. Ou, au contraire, l'originalité des mises en scène photographiques de la future sainte ne peut être saisie qu'après les avoir perçues dans le contexte historique et local de la vie conventuelle quotidienne de Lisieux. Les archives du carmel de Lisieux comptent plusieurs centaines de photographies réalisées dans l'enceinte du couvent entre 1894 et les années 1950, la plupart ayant été exécutées par Céline Martin (1869-1959), soeur laïque et conventuelle de Thérèse de l'Enfant-Jésus. Ces mêmes archives conservent également le matériel photographique de Céline Martin, ses notes techniques et, en plus des négatifs verre et souples, de nombreuses vues stéréoscopiques, des autochromes, des tirages citrate, ainsi que plusieurs albums. Riche et éclectique, le fonds photographique du carmel de Lisieux permet une analyse significative d'une pratique photographique à l'intérieur d'un couvent de la fin du xixe siècle, une pratique jusqu'à présent ignorée par les historiens de la photographie.
Issue d'un milieu bourgeois, Céline Martin se forme à la photographie durant sa jeunesse 3 , aux côtés d'un ami de sa famille, l'abbé Joseph de Cornière (1874-1939), et de sa cousine Marie Guérin (1870-1905). Tous trois réalisent dès 1894 une remarquable série de tableaux vivants photographiés, intitulée Voyages excentrique aux Cordillères des Andes 4 (fig. 2). Une telle pratique amateur de la photographie est sans doute favorisée par le contexte régional normand, qui voit se multiplier à la fin du siècle les sociétés et les clubs photographiques 5 . Après son entrée au carmel, le 14 septembre 1894 6 , Céline Martin fixe en images le quotidien de ses soeurs conventuelles, en faisant preuve dans cette production d'un véritable souci artistique. La photographie prend dès lors sa place dans le fonctionnement réglé du carmel.
Cette production vernaculaire 7 s'apparente ainsi socialement au type particulier de la photographie de famille 8 , dont elle reprend les codes en les adaptant au contexte d'une famille conventuelle. La photographie participe donc à la construction de l'identité communautaire des carmélites de Lisieux. Pourtant, la popularité rapide de Thérèse de l'Enfant-Jésus a joué un rôle majeur dans la reconnaissance publique de ce fonds photographique, tout en imposant un point de vue focalisé sur un seul individu représenté. Dès les premières démarches entreprises pour la cause thérésienne, la photographie a été amenée à jouer un rôle dans la conception d'une iconographie de la future sainte. Cependant, ce caractère iconique n'intervient qu'après coup, et de manière rétrospective, par rapport aux motivations initiales de préservation d'une identité communautaire. Cet enjeu identitaire demeure, même après la mort de sa soeur, l'une des principales motivations de Céline Martin pour réaliser ses prises de vue.
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Fig. 2. C. Martin, J. de Cornière et M. Guérin, Voyage excentrique aux Cordillières des Andes, négatif verre au gélatino-bromure d'argent, 13 x 18 cm, juillet 1894, coll. Archives du carmel de Lisieux.
La photographie au carmel de Lisieux, construction d'une identité communautaire
La pratique photographique au sein de la clôture carmélitaine impose à Céline Martin d'évoluer en vase clos. La photographie est ainsi contrainte spatialement par les mêmes lieux réinvestis d'une séance de prises de vue à l'autre. À cette typologie de lieux s'additionne une typologie de poses relativement conventionnelles. Le costume identique des soeurs, excepté les voiles et le port d'un manteau, accentue encore le sentiment de répétition entre les différentes photographies. Mais cette homogénéité apparente des clichés renforce aussi l'objectif de ce corpus : témoigner d'une identité communautaire.
La pratique de la photographie au sein du couvent atteste également des usages sociaux similaires à ceux observés au sein d'une famille : les événements majeurs de la vie des membres, et en particulier les différentes étapes de la vie conventuelle, y sont immortalisés. Ce sont par exemple les cérémonies de prise d'habit d'une soeur ( fig. 1), lors desquelles la postulante revêt une robe de mariée avant de porter le vêtement carmélitain. Ce sont les décès, à l'occasion desquels un portrait post mortem est systématiquement réalisé (fig. 3 et fig. 4). Le carmel de Lisieux conserve ainsi de très nombreuses photographies exécutées par Céline Martin, qui représentent les différentes soeurs entrées au carmel revêtir les mêmes vêtements cérémoniels, prendre les mêmes poses, dans les mêmes lieux, à l'occasion des mêmes événements de leur vie conventuelle.
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Fig. 3. C. Martin, Thérèse morte exposée au choeur, aristotype retouché d'après un négatif verre détruit, 3 octobre 1897, coll. Archives du carmel de Lisieux.
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Fig. 4. C. Martin, « Portrait post-mortem de Marie-Ange », négatif verre au gélatino-bromure d'argent, 1909, coll. Archives du carmel de Lisieux.
Les tirages sont utilisés d'une part pour accompagner la correspondance adressée à la famille laïque, éloignée par une clôture dont l'imperméabilité s'ajoute à la distance physique. Les carmélites ont à coeur de montrer à leurs destinataires l'évolution de leurs traits, tout comme le cadre de leur vie conventuelle 9 et les nouveaux protagonistes de cette vie 10 . Ces photographies peuvent être adressées à la famille ou à des correspondants réguliers, tel un prêtre des Missions étrangères de Paris à qui Thérèse de l'Enfant-Jésus envoie un portrait 11 .
Les photographies de carmélites se placent en effet à la limite entre deux familles : la famille laïque, à laquelle sont adressées les photographies par la correspondance, et la famille conventuelle, à laquelle le modèle peut aussi prétendre. Si la circulation des photographies au sein de la correspondance délimite une identité familiale laïque, la conservation de ces mêmes photographies dans la clôture à l'intérieur d'albums participe à la création d'une identité familiale conventuelle. Le format de l'album apparaît ici comme un transfert direct en milieu monacal d'un usage domestique de la photographie.
Plusieurs albums représentant la communauté ont ainsi été enrichis par des générations de soeurs ou confectionnés ponctuellement à l'occasion d'une fête, afin d'être offerts en cadeau à une soeur ou une mère prieure. L'exemple le plus significatif est L'Album offert à mère Marie de Gonzague pour sa fête le 21 juin 1897, le seul album datant du vivant de Thérèse de l'Enfant-Jésus à avoir été conservé dans son intégrité. Cet album emprunte l'ensemble des conventions d'un homologue qui aurait été conservé dans l'intimité du cercle familial. Il met en oeuvre les mêmes enjeux de légitimation et de filiation.
La succession des planches s'organise en deux parties principales. La première a trait à la vie de la communauté et met en avant les bienfaits de la vie carmélitaine, en regard de citations bibliques et de paroles de saints, spécialement sainte Thérèse d'Avila (1515-1582). Ces citations ont été choisies par Thérèse de l'Enfant-Jésus. La seconde partie raconte le quotidien d'une postulante et le chemin à parcourir jusqu'à son intégration définitive dans la communauté carmélitaine. Elle est accompagnée par un texte plus personnel, écrit par Thérèse de l'Enfant-Jésus en adaptant librement les Écritures.
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Fig. 5. C. Martin et Thérèse de l'Enfant-Jésus, planche 1 (verso) de l'Album offert à mère Marie de Gonzague pour sa fête le 21 juin 1897, aristotypes collés sur carton, 25,5 x 34 cm, coll. Archives du carmel de Lisieux.
La mise en place des images à l'intérieur de l'album crée une progression narrative, en donnant à chaque photographie un sens particulier en fonction de celles qui la précèdent et la suivent. La première partie s'ouvre sur l'organisation hiérarchique de la société conventuelle. Sur la première planche, se présentent les soeurs fondatrices du carmel de Lisieux, ancêtres de la communauté, et une première vue des bâtiments conventuels 12 (fig. 5). Par la suite, plusieurs photographies des lieux permettent au lecteur de cheminer, à la manière d'une postulante, de l'extérieur vers l'intérieur du carmel et du cloître, jusqu'à atteindre le cimetière qui clôt symboliquement cette série. Les mères prieures et les doyennes du carmel sont les premières à apparaître dans l'album. L'une des premières images figure ainsi mère Marie de Gonzague (1834-1904), à qui l'album est destiné, aux côtés de mère Agnès de Jésus (Pauline Martin, 1861-1951). La pose de cette dernière met en avant la clé du couvent qui témoigne de son autorité, Agnès de Jésus ayant précédé mère Marie de Gonzague à la charge de mère prieure ( fig. 6). Le thème de la filiation est ici souligné par l'emprunt qui est fait à l'iconographie traditionnelle de l'éducation de la Vierge, apprenant à lire aux côtés de sa mère sainte Anne. Un certain humour n'est cependant pas impossible dans ce type d'emprunt explicite, dans la mesure où Marie de Gonzague, jouant ici le rôle de la Vierge, est manifestement plus âgée que mère Agnès de Jésus. Au sein des portraits de groupe, le placement des soeurs, dirigé par Céline Martin, répond à la fois à des règles esthétiques et à des conventions hiérarchiques. De ce fait, les figures d'autorité des mères prieures ordonnent les portraits de la communauté, en se plaçant au sommet ou au centre des compositions pyramidales privilégiées par la photographe. La hiérarchie carmélitaine montre ainsi successivement les mères supérieures, les soeurs professes, les soeurs novices et les postulantes. Un portrait de groupe rend particulièrement apparent cet agencement descendant ( fig. 7) : à la fenêtre se profilent mère Marie de Gonzague et mère Agnès de Jésus, tandis qu'au premier plan, quatre novices entourent Thérèse de l'Enfant-Jésus. Elle est ici représentée dans son rôle de sous-maîtresse des novices, et distinguée par son voile noir et son sablier, l'attribut des carmélites. Le costume démarque ici non seulement la soeur professe des novices, mais aussi les deux mères prieures portant un manteau blanc. Il faut noter qu'aucune légende n'identifie les individus visibles sur le cliché, soit qu'ils soient aisément reconnaissables pour le lecteur de cet album de famille, soit que ces portraits ne soient ici que les protagonistes généraux d'une histoire de la vie carmélitaine. En ce sens, cette première partie se propose comme une répétition de l' Histoire d'une postulante qui occupe toute la seconde partie de l'album.
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Fig. 6. C. Martin et Thérèse de l'Enfant-Jésus, planche 2 (recto) de l'Album offert à mère Marie de Gonzague pour sa fête le 21 juin 1897, aristotypes collés sur carton, 25,5 x 34 cm, coll. Archives du carmel de Lisieux.
Histoire d'une postulante constitue explicitement une narration sous la forme d'une série de tableaux vivants photographiés. Ces compositions sont mises en scène par Céline Martin et jouées par sa cousine Marie Guérin, qui rejoint le carmel de Lisieux en 1895. Elles illustrent les tâches quotidiennes d'une postulante jusqu'au jour de sa prise d'habit et de son nouveau statut de novice ( fig. 8). Histoire d'une postulante est ainsi le point d'arrivée de la hiérarchie descendante initiée dès la première planche de l'album. Cette série est extrêmement atypique au sein de la production de Céline Martin postérieure à son entrée au carmel. Or, ce jeu théâtral entre Céline Martin et Marie Guérin se situe exactement à l'intersection de traditions familiales laïque et conventuelle. Les tableaux vivants photographiés prolongent en effet au sein du couvent les jeux de leur enfance 13 , et une première pratique de ce type de mises en scène établie par Voyages excentrique aux Cordillère des Andes, auquel les deux cousines participèrent comme à un loisir de vacances. À ce substrat familial se superpose la tradition du théâtre carmélitain, qui invitait les soeurs d'un carmel à organiser des pièces morales lors de fêtes religieuses ou données en l'honneur de leur mère prieure. Sainte Thérèse d'Avila, réformatrice des couvents carmélites, préconise ces fêtes et récréations afin de resserrer les liens fraternels de la communauté 14 .
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Fig. 7. C. Martin et Thérèse de l'Enfant-Jésus, planche 10 (recto) de l'Album offert à mère Marie de Gonzague pour sa fête le 21 juin 1897, aristotypes collés sur carton, 25,5 x 34 cm, coll. Archives du carmel de Lisieux.
Au-delà d'un cadeau offert à une mère prieure, l'album de mère Marie de Gonzague est à la fois un objet symbolique comparable à un album de famille, qui fixe l'identité d'une communauté dont elle avait la charge, et le récit en images de l'intégration d'une postulante au sein de cette même famille conventuelle.
Les portraits de Thérèse de l'Enfant-Jésus
Contrairement aux idées reçues, les portraits de Thérèse de l'Enfant-Jésus ne la différencient pas mais s'inscrivent dans cette même dynamique d'identité collective de la communauté. Il est certain, d'après les récits faits par les soeurs du couvent, notamment lors des procès pour la Cause thérésienne 15 , que Thérèse de l'Enfant-Jésus jouait un rôle important au sein de la communauté carmélitaine. Sa position de cadette, tant dans la famille Martin, qu'au sein du carmel, a assurément déterminé sa réputation de favorite. Pourtant, ce n'est pas à ce titre qu'elle doit sa singularité dans les photographies de Céline Martin, qui semble avoir plutôt entretenu une complicité privilégiée avec sa cousine Marie Guérin dans l'exécution de cette activité. C'est sa fonction de sous-maîtresse des novices, qui la place dans une position distinctive vis-à-vis des autres soeurs, une place hiérarchiquement supérieure vis-à-vis des novices, sans nécessairement la doter d'une aura particulière ( fig. 7).
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Fig. 8. C. Martin et Thérèse de l'Enfant-Jésus, planche 12 (verso) de l'Album offert à mère Marie de Gonzague pour sa fête le 21 juin 1897, aristotypes collés sur carton, 25,5 x 34 cm, coll. Archives du carmel de Lisieux.
Il n'en demeure pas moins que le désir de fixer les traits de Thérèse de l'Enfant-Jésus s'accentue avec l'annonce de sa mort prochaine. Au cours de sa dernière maladie, les portraits individuels se multiplient, mettant en scène Thérèse de l'Enfant-Jésus avec des attributs iconographiques de son statut de religieuse ( fig. 9) :
« Notre petite soeur Th. de l'Enf. Jésus est vraiment bien malade et nous sommes profondément inquiètes. [...] Comme ma Sr Th. de l'Enf. Jésus change beaucoup et que bientôt elle ne pourra peut-être plus se tenir debout, nous voudrions la photographier pour la fête de notre Mère [...] Alors nous avons pensé que vous pourriez peut-être nous en procurer soit par Mr. Lahaye soit par Mr. de Cornière ; Joseph nous avait dit que l'appareil était à notre disposition. Il nous faudrait avec cela, lanterne rouge et boîtes de plaques. Pourrais-tu nous procurer cela pour demain ? Je crois que cela est bien utile, car ce sera une grande consolation pour nous d'avoir une belle photographie 16 . »
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Fig. 9. C. Martin, « Photographie d'une photographie représentant Céline Martin agenouillée », négatif souple, 13 x 18 cm, non datée, coll. Archives du carmel de Lisieux.
Ce portrait singulier de Thérèse de l'Enfant-Jésus est ensuite, suivant les dires de Marie Guérin, intégré à l'album offert à mère Marie de Gonzague pour sa fête, mais en regard d'un second portrait très similaire, celui de Céline Martin ( fig. 9 et fig. 11). La planche semble ainsi illustrer les deux auteures de l'album, celle des textes et celle des images.
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Fig. 10. C. Martin, Thérèse « au chapelet », négatif verre au gélatinobromure d'argent, 13 x 18 cm, 12 (?) juillet 1896, coll. Archives du carmel de Lisieux.
Le même portrait sera par la suite extrait de son corpus d'origine, et définitivement mis à l'écart, en apparaissant au frontispice de la première édition d'Histoire d'une âme, récit autobiographique du modèle photographié, publié en 1898. L'image servira en outre, avec d'autres portraits, de référent visuel pour la production par le carmel de portraits peints représentant la future sainte. Pourtant, il faut constater que rien à l'origine ne le distinguait particulièrement du portrait de Céline Martin. De la même manière, la plupart des portraits individuels de Thérèse de l'Enfant-Jésus montrent des similarités troublantes avec ceux d'autres soeurs, au cours d'événements marquants de leur vie, de la maladie ou dans la mort. Le portrait post mortem de Thérèse de l'Enfant-Jésus (fig. 3), morte en 1897, est similaire à celui de Marie-Ange (fig. 4), qui meurt onze ans plus tard. Plusieurs hypothèses peuvent dès lors être formulées. Il faut d'abord souligner une fois encore l'exiguïté spatiale du couvent, le nombre restreint de poses possibles et le costume identique (vêtements et attributs) porté par les soeurs défuntes lors de la veillée funèbre. De plus, Thérèse de l'Enfant-Jésus est dans les faits la première soeur que Céline Martin voit mourir dans le couvent et qu'elle photographie en établissant un code de représentation qu'elle reprend ensuite à chaque mort d'une autre de ses soeurs conventuelles. Enfin, il est évident que Thérèse de l'Enfant-Jésus devient elle-même très vite un catalyseur de la mémoire et de l'identité du carmel du Lisieux, au point que ses portraits ont pu être choisis consciemment ou non par Céline Martin comme des référents pour les portraits postérieurs des autres soeurs de la communauté.
Ce rôle fédérateur joué par l'image de Thérèse de l'Enfant-Jésus est évident dans les portraits de groupe qui suivent sa mort. Animées par le même souci de cohésion familiale, ces compositions réunissent la communauté autour d'un portrait peint ou d'une statue de Thérèse de l'Enfant-Jésus à partir du début du xxe siècle, de la même manière qu'elles s'organisaient auparavant autour de la croix du préau ( fig. 7 et fig. 12). La pérennisation de ce type de composition met toujours en évidence la cohésion de la communauté, plutôt que le caractère d'une des soeurs.
Pour une histoire sociale et artistique de la photographie religieuse
Ce n'est pas ici le lieu pour développer en détail l'ensemble des activités photographiques de Céline Martin dans l'enceinte du carmel de Lisieux. Ses productions se multiplient après la mort de Thérèse de l'Enfant-Jésus au moment où la photographe prend la direction et le contrôle de la diffusion du portrait de sa soeur. L'usage propagandiste d'une telle récupération est évident, mais ne doit pas occulter le fait qu'elle a eu aussi pour but dans un cercle privé de fédérer la communauté carmélitaine de Lisieux derrière son héroïne. La constitution des archives du carmel de Lisieux, initiée du vivant de Céline Martin par la réunion de toutes les photographies représentant sa soeur, assume elle-même cette double fonction : publique - la promotion de la cause thérésienne et de la sainte - et privée - la réunion des carmélites de Lisieux autour de la figure mythique de sainte Thérèse de l'Enfant-Jésus.
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Fig. 11. C. Martin et Thérèse de l'Enfant-Jésus, planche 16 (verso) de l'Album offert à mère Marie de Gonzague pour sa fête le 21 juin 1897, aristotypes collés sur carton, 25,5 x 34 cm, coll. Archives du carmel de Lisieux.
Ces transformations de la pratique et de l'usage de la photographie au carmel de Lisieux méritent l'intérêt de l'historien de la photographie, mais elles ne doivent pas l'écarter de la réalité primordiale de son objet d'étude : la production photographique globale en vase clos d'une communauté à la recherche de sa propre image. Il s'agit là d'une pratique ordinaire et domestique du médium photographique. Initiée par Céline Martin, elle s'est perpétuée au sein du carmel avec la confection d'albums qui, jusqu'aux années 1940-1950, réutilisent parfois des images créées par Céline Martin ou obtenues en exploitant son matériel ou en suivant ses conseils de prises de vue.
Cette recherche se propose comme une contribution à la découverte d'un domaine inexploré des études photographiques que l'on pourrait qualifier provisoirement comme une véritable histoire sociale et artistique de la photographie religieuse. Cette histoire pourrait s'articuler autour d'un objet d'étude riche et singulier, que constitue en particulier le patrimoine détenu par les institutions religieuses. Une enquête auprès de plusieurs services d'archives de couvents français révèle une tradition de l'usage du médium s'établissant dès le tournant du xxe siècle dans ces milieux prétendus hermétiques. Or, ce patrimoine reste aujourd'hui encore majoritairement ignoré 17 . Une doxa, issue d'une histoire mythique de la photographie comme médium moderniste, a en effet opposé dès l'origine le procédé mécanique et scientifique et l'Église, considérée comme le parangon d'une institution conservatrice ou réactionnaire. Cette même doxa singularise d'autant plus ce corpus d'étude et ses enjeux sociaux.
De plus, la production photographique en contexte religieux est particulièrement riche de sens. Le cas du carmel de Lisieux permet de concevoir non seulement un usage mémoriel et identitaire de la photographie, mais aussi la transformation de ces mêmes clichés en objets de dévotion, ou au moins d'attentions particulières. Conservées dans un coffre anti-feu aux archives du carmel de Lisieux, les plaques de verre ayant capturé l'image de Thérèse de l'Enfant-Jésus sont les seules à bénéficier d'une telle mesure protectrice, représentative de leur valeur de reliques. Le même poids symbolique a par ailleurs contraint l'Institut catholique de Paris en novembre 2013 à retirer de la vente d'une partie de sa collection photographique les tirages à taille réelle de Giuseppe Enrie (1886-1961) représentant le saint suaire de Turin 18 . Le contexte religieux conduit ainsi dès le xixe siècle à fonder un nouveau statut de l'objet photographique. L'exemple de la vente de l'Institut catholique montre également une certaine urgence de la recherche sur ce patrimoine mal connu et donc vulnérable.
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Fig. 12. C. Martin, « La Communauté dans l'allée des marronniers, autour du portrait de "Thérèse à la harpe" de Pascal Blanchard », négatif verre au gélatino-bromure d'argent, 13 x 18 cm, entre 1901 et 1904, coll. Archives du carmel de Lisieux.
Le corpus mis en valeur ici a trait à plusieurs genres traditionnellement distincts de l'histoire de la photographie tout en étant en lui-même une nouvelle manière d'envisager l'histoire du procédé photographique. Il pourrait reprendre à son compte cette citation de Mathieu Pernot et Philippe Artières, au sujet de la production photographique dans un asile psychiatrique tenu par des religieuses :
« Très vite, s'est imposée à nous l'idée que ce corpus constituait moins l'histoire en images d'une institution, emblématique de l'évolution de la psychiatrie, qu'une histoire de la photographie vue depuis l'hôpital, lieu de vie à la fois spécifique et banal - une histoire non marginale mais à la marge, une sorte d'asile des photographies 19 . »
Du point de vue méthodologique, une histoire de la photographie religieuse peut se concevoir comme une pratique amateur de la photographie au service d'usages particuliers aux milieux religieux. Le seul cas du carmel de Lisieux démontre en effet qu'il est important de ne pas s'attacher à la seule dimension publique, politique et propagandiste de ces photographies, mais également de savoir en apprécier les enjeux plus ordinaires.
Notes
1 François de Sainte-Marie, Visage de Thérèse de Lisieux, Lisieux, Office central de Lisieux, 1961.
2 Marion Lavabre, « Sainte comme une image », Terrain, no 24, 1995, en ligne : http://terrain.revues.org/3116.
3 Les circonstances de cet apprentissage ne sont pas précisément renseignées, mais l'acquisition d'un appareil photographique par la famille Martin se fait au plus tard en 1891. Archives du carmel de Lisieux (ACL), Lettre de Céline Martin à Jeanne La Néele, 3 septembre 1891. L'intégralité de la correspondance connue de la famille Martin est conservée aux ACL, et disponible en ligne sur leur site Internet : http://www.archives-carmel-lisieux.fr.
4 Céline Martin témoigne de cette activité dans une lettre : lettre de Céline Martin à Thérèse de l'Enfant-Jésus, 17 juillet 1894. Cette série de photographies est visible sur le site Internet des ACL.
5 Au sein de ce contexte photographique amateur régional, il faut notamment mettre en avant le nom de l'abbé Alexandre Dubosq (1856-1946), qui installe en 1885 un studio photographique dans son presbytère. En 1900, il est le fondateur de la Société photographique de Bayeux, dont les activités sont associées à celles de la société caennaise. Voir la liste des membres de la société publiée dans La Société caennaise de photographie, 1891-1948, Cahier (Association régionale pour la diffusion de l'image-Photographies en Basse-Normandie), no 1, octobre 2007, p. 44-47. Cette liste des adhérents compte trois abbés.
À propos d'Alexandre Dubosq, cf. Serge David et Bernard Chereau, Alexandre Dubosq photographe, de l'instant à l'éternité, Cabourg, Cahiers du temps 2002 ; Patricia Delmare, Alexandre Dubosq, curé reporter, Paris, Chêne, 1987.
6 Selon la tradition orale du carmel, Céline Martin aurait été autorisée lors de son entrée à amener son équipement photographique. Nos recherches nous conduisent plutôt à penser que Céline Martin s'est fait prêter le matériel nécessaire aux prises de vue jusqu'à la fin du xixe siècle. La date de l'introduction définitive d'un appareil photographique dans la clôture carmélitaine n'est pas connue.
7 Pour une définition de la photographie vernaculaire, nous renvoyons à : Clément Chéroux, Vernaculaires : essais d'histoire de la photographie, Cherbourg-Octeville, Le Point du jour, 2013, p. 13.
8 Pierre Bourdieu peut être considéré comme un auteur pionnier dans l'étude des usages quotidiens de la photographie, en particulier ceux du cercle familial, quoique son ouvrage ne propose aucun point de vue historique sur la question. Pierre Bourdieu, Un art moyen. Essai sur les usages sociaux de la photographie, Paris, Minuit, 1965, p. 39-67 et 246-249.
9 Lettre de soeur Marie de l'Eucharistie [Marie Guérin] à Céline Guérin, 21 juillet 1898 : « [...] notre fenêtre donne sur le préau que tu connais par les photographies, puis je vois la maison du bon Dieu ». Lettre de soeur Geneviève [Céline Martin] à soeur Françoise-Thérèse [Léonie Martin], 4 août 1932 : « J'aurais voulu t'envoyer des photos du nouveau jardin, mais je n'ai pas eu encore le courage d'en prendre et ce n'est pas le moment de sortir avec nos rhumes. »
10 Lettre de soeur Geneviève [Céline Martin] à soeur Françoise-Thérèse [Léonie Martin], 7 juin 1908 : « Nous sommes très contentes de notre nouvelle petite-grande Mère [...]. Je l'ai photographiée avec petite Mère et nous t'envoyons cette photographie avec un autre groupe de nous 3 tiré la veille de la déposition, 7 mai. »
11 Lettre du père Roulland à mère Marie de Gonzague, 29 juillet 1896 ; lettre de soeur Thérèse de l'Enfant-Jésus au père Roulland, LT 193, 30 juillet 1896. L'intégralité de la correspondance connue de Thérèse de l'Enfant-Jésus est publiée dans Correspondance générale, t. 1 et 2, l'abréviation LT et le numéro de la lettre sont alors indiqués. Thérèse de l'Enfant-Jésus, Correspondance générale 1877-1890, t. 1, Paris, Éditions du Cerf et Desclée de Brouwer, coll. « Édition critique des OEuvres complètes de sainte Thérèse de l'Enfant-Jésus et de la Sainte-Face », 1972 ; Thérèse de l'Enfant-Jésus, Correspondance générale 1890-1897, t. 2, Paris, Éditions du Cerf et Desclée de Brouwer, coll. « Édition critique des OEuvres complètes de sainte Thérèse de l'Enfant-Jésus et de la Sainte-Face », 1974.
12 L'intégralité de l'album a été numérisée récemment et est aujourd'hui consultable sur le site Internet des ACL.
13 Ces jeux sont mentionnés dans les documents suivants : lettre de Marie Guérin à Jeanne La Néele, été 1878 ou 1879 ? ; lettre de Pauline Martin à Céline Guérin, 9 août 1880 ; Céline Martin, Souvenirs autobiographiques, cité in Thérèse de l'Enfant-Jésus, Théâtre au Carmel : récréations pieuses, nouvelle édition du centenaire, 2e éd. revue et corrigée, Paris, Éditions du Cerf et Desclée de Brouwer, coll. « Édition critique des OEuvres complètes de sainte Thérèse de l'Enfant-Jésus et de la Sainte-Face », 1992, p. 17.
14 Thérèse d'Avila, mère Marie du Saint-Sacrement (trad.), OEuvres complètes, Paris, Éditions du Cerf, 1995.
15 À ce sujet, cf. Procès de béatification et de canonisation, t. 1 : Procès informatif ordinaire, Rome, Teresianum, 1973 ; t. 2 : Procès apostolique, Rome, Teresianum, 1976. Les textes et notes du procès apostolique ont été mis en ligne sur le site de la bibliothèque de la congrégation pour le Clergé : http://www.clerus.org/clerus/dati/2000-02/296/ProcesApostoliqueArticles.html.
16 Lettre de soeur Marie de l'Eucharistie [Marie Guérin] à Isidore Guérin, 5 juin 1897.
17 Le patrimoine des communautés religieuses a fait l'objet d'un colloque organisé par l'Association des conservateurs des antiquités et objets d'art de France, tenu à Moulin du 29 septembre au 1er octobre 2011. Christine Labeille (dir.), Regards sur le patrimoine des congrégations religieuses, [Actes du colloque de l'Association des conservateurs des antiquités et objets d'art de France, Moulins, 2011], Arles, Actes Sud, coll. « Regard sur », 2013.
18 Fonds photographique de l'Institut catholique de Paris, catalogue de vente, Paris, Hôtel Drouot (17 novembre 2013), lots no 162 à 171.
19 Mathieu Pernot et Philippe Artières, L'Asile des photographies : la fondation Bon-Sauveur à Picauville, Cherbourg-Octeville, Le Point du Jour, 2013. L'exposition a été présentée du 1er novembre 2013 au 12 janvier 2014 au Centre de la photographie de Genève, ainsi que du 13 février au 11 mai 2014 à la Maison Rouge de Paris.
Table des illustrations
Légende Fig. 1. C. Martin, « Marie-Ange, le jour de sa prise d'habit », négatif verre au gélatino-bromure d'argent, 13 x 18 cm, 20 novembre 1902, coll. Archives du carmel de Lisieux.
URL http://etudesphotographiques.revues.org/docannexe/image/3551/img-1.jpg
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Légende Fig. 2. C. Martin, J. de Cornière et M. Guérin, Voyage excentrique aux Cordillières des Andes, négatif verre au gélatino-bromure d'argent, 13 x 18 cm, juillet 1894, coll. Archives du carmel de Lisieux.
URL http://etudesphotographiques.revues.org/docannexe/image/3551/img-2.jpg
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Légende Fig. 3. C. Martin, Thérèse morte exposée au choeur, aristotype retouché d'après un négatif verre détruit, 3 octobre 1897, coll. Archives du carmel de Lisieux.
URL http://etudesphotographiques.revues.org/docannexe/image/3551/img-3.jpg
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Légende Fig. 4. C. Martin, « Portrait post-mortem de Marie-Ange », négatif verre au gélatino-bromure d'argent, 1909, coll. Archives du carmel de Lisieux.
URL http://etudesphotographiques.revues.org/docannexe/image/3551/img-4.jpg
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Légende Fig. 5. C. Martin et Thérèse de l'Enfant-Jésus, planche 1 (verso) de l'Album offert à mère Marie de Gonzague pour sa fête le 21 juin 1897, aristotypes collés sur carton, 25,5 x 34 cm, coll. Archives du carmel de Lisieux.
URL http://etudesphotographiques.revues.org/docannexe/image/3551/img-5.jpg
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Légende Fig. 6. C. Martin et Thérèse de l'Enfant-Jésus, planche 2 (recto) de l'Album offert à mère Marie de Gonzague pour sa fête le 21 juin 1897, aristotypes collés sur carton, 25,5 x 34 cm, coll. Archives du carmel de Lisieux.
URL http://etudesphotographiques.revues.org/docannexe/image/3551/img-6.jpg
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Légende Fig. 7. C. Martin et Thérèse de l'Enfant-Jésus, planche 10 (recto) de l'Album offert à mère Marie de Gonzague pour sa fête le 21 juin 1897, aristotypes collés sur carton, 25,5 x 34 cm, coll. Archives du carmel de Lisieux.
URL http://etudesphotographiques.revues.org/docannexe/image/3551/img-7.jpg
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Légende Fig. 8. C. Martin et Thérèse de l'Enfant-Jésus, planche 12 (verso) de l'Album offert à mère Marie de Gonzague pour sa fête le 21 juin 1897, aristotypes collés sur carton, 25,5 x 34 cm, coll. Archives du carmel de Lisieux.
URL http://etudesphotographiques.revues.org/docannexe/image/3551/img-8.jpg
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Légende Fig. 9. C. Martin, « Photographie d'une photographie représentant Céline Martin agenouillée », négatif souple, 13 x 18 cm, non datée, coll. Archives du carmel de Lisieux.
URL http://etudesphotographiques.revues.org/docannexe/image/3551/img-9.jpg
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Légende Fig. 10. C. Martin, Thérèse « au chapelet », négatif verre au gélatinobromure d'argent, 13 x 18 cm, 12 (?) juillet 1896, coll. Archives du carmel de Lisieux.
URL http://etudesphotographiques.revues.org/docannexe/image/3551/img-10.jpg
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Légende Fig. 11. C. Martin et Thérèse de l'Enfant-Jésus, planche 16 (verso) de l'Album offert à mère Marie de Gonzague pour sa fête le 21 juin 1897, aristotypes collés sur carton, 25,5 x 34 cm, coll. Archives du carmel de Lisieux.
URL http://etudesphotographiques.revues.org/docannexe/image/3551/img-11.jpg
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Légende Fig. 12. C. Martin, « La Communauté dans l'allée des marronniers, autour du portrait de "Thérèse à la harpe" de Pascal Blanchard », négatif verre au gélatino-bromure d'argent, 13 x 18 cm, entre 1901 et 1904, coll. Archives du carmel de Lisieux.
URL http://etudesphotographiques.revues.org/docannexe/image/3551/img-12.jpg
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Fanny Brulhart prépare actuellement un doctorat d'histoire de l'art consacré au patrimoine photographique des communautés religieuses, et s'intéresse plus largement au phénomène de la photographie religieuse. Son mémoire de Master 2, effectué à l'École du Louvre, prenait pour objet d'étude le cas particulier du carmel de Lisieux, depuis l'entrée dans son enceinte de Thérèse de l'Enfant-Jésus (1891) jusqu'à la mort de Céline Martin (1959).
Droits d'auteur
© Etudes photographiques
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Copyright Société Française de Photographie 2015
Abstract
Les portraits photographiques de sainte Thérèse de Lisieux, diffusés depuis le début du XXe siècle aux fidèles, ne constituent qu'un fragment de l'oeuvre de sa soeur laïque et conventuelle Céline Martin, encore méconnu aujourd'hui. Conservé aux archives du carmel de Lisieux, ce fonds singulier souffre paradoxalement de la popularité de la sainte en ne servant que de documentation pour attester de la vie de la carmélite.
Derrière ces usages, se dissimule en effet un fonds photographique riche et éclectique, qui offre de nouvelles perspectives sur l'histoire du médium. Ces photographies sont avant tout des portraits de groupes, qui attestent à la fois d'une pratique quotidienne et amateur de la photographie au sein d'un milieu conventuel clos, et participent d'une construction identitaire de la communauté. Menée par Céline Martin, cette activité photographique se situe ainsi à la marge du monde et des définitions traditionnelles de l'histoire de la photographie.
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