Resumen
El artículo intenta presentar los desafíos de la hermenéutica crítica de Jean Bollack. Este método de traducción recomienda que, para ser eficaz, el examen filológico que busca cerrar la distancia entre la obra y su traducción debe ser reforzado por una interpretación crítica. Al no separar el trabajo de traducción del trabajo de interpretación, la lectura del texto fuente requiere su historización radical que, sin ignorar el momento de su creación, tiene como objetivo conocer sus representaciones ulteriores. En resumen, la historización del significado del texto se convierte en la condición de su interpretación. Situada en la doble tradición del autor y del traductor, la hermenéutica crítica confronta sus horizontes de expectativa en la búsqueda del significado del original. Históricamente determinada, ofrece una aproximación crítica al texto para traducir, que toma en consideración su recepción en varios momentos y el «conflicto de interpretaciones» causado por sus lecturas.
Palabras clave: Bollack, Hermenéutica crítica, Historización, Interpretación, Traducción.
Resume
L'article tente de presenter les enjeux de l'herméneutique critique de Jean Bollack. Cette méthode de traduction préconise que, pour étre efficace, ľexamen philologique qui cherche a combler la distance entre l'æuvre et sa traduction, doit étre renforcé par une interpretation critique. Ne séparant pas le travail de traduction du travail ďinterprétation, la lecture du texte-source demande son historisation radicale qui, sans ignorer le moment de sa creation, vise a connaitre ses representations ultérieures. Bref, l'historisation du sens du texte devient la condition de son interpretation. Placee dans la double tradition de ľauteur et du traducteur, ľherméneutique critique confronte leurs horizons d'attente dans la recherche du sens de ľ original. Historiquement déterminée, elle propose une approche critique du texte a traduire, qui prend en consideration sa reception a diverses époques et le « conflit des interpretations » suscité par ses lectures.
Mots-clés : Bollack, Herméneutique critique, Historisation, Interpretation, Traduction.
Abstract
The article attempts to present the challenges of Jean Bollack's critical hermeneutics. This method of translation recommends that, to be effective, the philological examination which aims to bridge the gap between the work and its translation, must be strengthened by a critical interpretation. Not separating the work of translation from the work of interpretation, the reading of the source text requires its historization. A radical historization aims to know its subsequent representations without ignoring the moment of its creation. In short, the historization of textual meaning becomes the condition of its interpretation. Placed in the double tradition of the author and the translator, critical hermeneutics confronts their horizons of expectation in the search for the meaning of the original. Historically determined, it offers a critical approach to the source text, which takes into consideration its reception at various times and the «conflict of interpretations» caused by its readings.
Keywords: Bollack, Critical Hermeneutics, Historization, Interpretation, Translation.
1. Introduction
La méthode interpretative conçue par Jean Bollack est connue sous le nom ďherméneutique critique. Les idées du fondateur du Centre de recherches philologiques, eréé â Lille en 1967, sur les problémes soulevés par ľinterprétation des oeuvres antiques emergent de sa propre pratique traductive. Avec Mayotte Bollack et une equipe de collaborateurs, parmi lesquels se distinguent André Laks, Heinz Wismann, Philippe Rousseau et Pierre Judėt de la Combe, il traduit Parmenide et Heraclite, et les grands tragiques Euripide et Sophocle. La relecture qu'il en propose repose sur un travail philologique minutieux et ponctuel, completé ďune appreciation philosophique. Ľherméneutique critique articule done ensemble ľacte philologique (ľétablissement des textes classiques par la comparaison de leurs versions conservées) et ľacte herméneutique (ľinterprétation de ces textes). Elle interroge le sens de l'original et son expression : Que dit le texte-source ? Comment le dit-il ? A quoi se référe-t-il ?
Ľherméneutique critique s'applique å déchiffrer correctement les signes, les locutions et les formes textuels. Elle rend possible ľidentification du sens primaire de l'original grace å ses lectures ultérieures qui contribuent å en degager les singularités et les differences par rapport å la traduction en cours. Placee dans la double tradition de l'auteur et du traducteur, cette demarche archéologique poursuit la quéte du sens originaire, en le débarrassant des significations qui s'y sont superposées dans le temps. Historiquement déterminée, elle adopte une approche critique qui tient compte de la reception de l'æuvre au fil des siedes et du conflit de ses interpretations (Ricœur, 1969). Interdisciplinaire, elle renforce l'étude philologique qui s'en tient å 1'analyse linguistique rigoureuse du texte par une interpretation critique qui presuppose la reflexion et la reconnaissance de ses references.
2. Uhistorisation radicale du sens
« Le philologue herméneute déchiffre une interpretation déposée dans une lecture, avant de pouvoir interpreter â son tour, en un deuxiěme temps, et ďen evaluer la portée » (Bollack, 2000 : 21). Ainsi, la comprehension du texte-source exige, d'abord, sa lecture ; ensuite, ľexamen de toutes les lectures dont ce texte a été objet; et enfin, la prise en consideration des traditions interprétatives de ľauteur et du traducteur. Dans la confrontation inevitable de son horizon d'attente avec celui de ľauteur, le traducteur doit prendre garde â ce que ses propres expectatives n'influencent pas excessivement sa comprehension de ľoriginal et ne ľengagent pas dans une mauvaise direction, tout en cherchant å saisir ľhorizon du texte et les possibilités de son interpretation adequate. Pour objectiver sa lecture, il doit la comparer â celles effectuées par des lecteurs compétents appartenant â d'autres cultures et â d'autres époques.
La nécessité ď une historisation radicale du sens est justifiée å partir de la prémisse que le cercle herméneutique permet de découvrir le sens dans la durée : « Une lecture quelle qu'elle soit ne se precise pas dans un vide de lectures » (Bollack, 1997 : 94). Le traducteur avisé parvient â inserire sa lecture dans l'histoire culturelle des lectures de ľoriginal. En effet, celles-ci vont ľ aider ä émettre des hypotheses moins subjectives sur le sens originaire, l'empécher de s'enfermer dans son interpretation limitée, lui éviter de subordonner la traduction ä son experience et ä sa tradition qui peuvent voller le sens premier du texte par une exégése tenue pour acquise. Du reste, le traducteur moderne d'Homére ou d'Aristote est mieux piacé pour acceder å leurs æuvres, aussi bien par rapport å leurs contemporains que par rapport å Sénéque ou å Dante, parce qu'il peut integrer å sa lecture, et par lå å la comprehension du sens, tout le savoir critique amoncelé depuis ľ Antiquité. Somme toute, les lectures medievales, de la Renaissance, des Lumiéres, etc. contribuent a mieux appréhender les æuvres classiques.
La traduction d'Œdipe roi de Sophocle est un exemple éloquent de cette approche archéologique qui tend å tracer les étapes de ľappropriation du texte a traduire par une culture, en parallele avec ľactualisation de la tradition å ľhorizon du traducteur. Bollack souligne, dans son avant-propos, ľimportance de ces elements pour le travail de reconstitution du sens que requiert toute traduction ďun texte ancien :
La traduction restera toujours ľaboutissement ultime ; elle fait moins passer le texte d'une langue å ľautre, qu'elle ne « traduit », sans commentaire et sans discussion, le resultat brut de ľ investigation scientifique. Elle ouvre les phrases, mais ce n'est pas son but ; elle explicite, en s'exprimant. La langue toujours en suit une autre: ľ allemand s'inscrit dans de ľ allemand, le français dans du français. Mais elle peut le faire avec une force nouvelle, si elle s'appuie sur la precision d'un instant de ľ elucidation, et si elle s'attache å ne rendre que le sens déjå trouvé ou retrouvé. Elle devrait passer de ľidée a ľ acte avec une fidéli té plus exacte que linguistiquement litterale. Toute traduction est marquee par l'état de la langue (Bollack, 1995 : 8).
Bien entendu, la traduction reflěte ľair du temps, ľévolution de la langue, les normes de la communauté â laquelle elle est destinée. Or, sa dépendance des conventions stylistiques et de ľacadémisme revele sa determination historique. Adepte de la méthode philologique et historique d'Ulrich von WilamowitzMoellendorff et de la méthode materielle et critique de Peter Szondi, Jean Bollack se dresse contre ľ interpretation qui se sert d'artefacts pour remonter au sens de ľoriginal : il la rejette avec ľargument que les textes sont des « constructions intellectuelles » autonomes, nourries d'« un regard critique sur la société de leur temps » (Bollack, 2000 : 37). Lacees immédiat å l'æuvre å traduire se revele du coup essentiel pour sa comprehension et la reduction des mésinterprétations. Ľhelléniste français distingue deux formes d'immédiateté (Bollack, 2000 : 38-39) : naturelle qui dirige directement vers le texte sans se soucier de la façon dont il est abordé ; et particuliere qui s'établit entre ľinterprete et le texte å chaqué lecture. En tant que condition de la comprehension, la premiere est indispensable pour interpreter des oeuvres classiques. On recourt â la deuxieme pour interpreter des oeuvres contemporaines. Soumise å la subjectivité du traducteur, ľimmédiateté particuliere est polysémique : la perception change en fonetion de la proximité du traducteur d'une théorie ou d'un mouvement littéraire ou philosophique. Elle reste assez equivoque, parce qu'elle ne dispose pas de critėres de justification des choix critiques qui visent a diminuer les interpretations erronées. Le manque de distance la prive de la possibilité de rectification grace aux interpretations accumulées au cours du temps.
Bollack soutient que la littéralité reside au fond de ľacte interprétatif:
Le sens littéral decide. Quand la lecture a pu finalement opter pour un texte, ce sens littéral n'est pas une « interpretation » de ľinterprete. Le philologue est lié par ľinterprétation qu est le texte. Ce sens littéral n'est pas un terme quelconque, qui pourrait étre déplacé comme un pion et mis en relation avec d'autres dans un jeu formel, pour la bonne raison que ce jeu, e'est 1'auteur qui ľa deja joué (Bollack, 1997 : 102).
Ainsi, le traducteur doit forcément passer par la lettre de ľ oeuvre : ď abord, au niveau lexical et syntaxique ; ensuite, au niveau de la structure poétique. Dans un premier temps, sa tache consiste å rechercher le sens fixe par ľ auteur : « Le sens de tout texte resulte d'un jeu savant avec les outils de la signification dont dispose un auteur. L'art seulement fixe parce que e'est toujours le "comment e'est dit" qui fait le sens » (Bollack, 2000 : 46). Cependant, ce sens n'est pas universel malgré ľinsertion du texte dans le contexte culturel et la tradition de son auteur. Dans un deuxiěme temps, aprěs avoir pris conscience que le déploiement du sens dépasse ľintention de ľauteur et en ľhistorisant par les interpretations déposées par dautres lectures, le traducteur pourra supprimer la distance qui le separe de ľoriginal.
Toutefois, les lectures critiques qui, dune part, favorisent laccés au sens du texte, de ľautre, peuvent lobscurcir, le brouiller, le deformer. Cest pourquoi Bollack accorde une attention particuliére â cet écueil. Primordiale pour la comprehension du sens, ľétude grammaticale est loin detre suffisante. Et puisque la syntaxe přete souvent â ľémission de plus dune hypothěse, pour approfondir la quéte du sens et eliminer les mauvaises interpretations, il faut interroger la signification globale du texte. De méme, la seule lecture philologique nest pas suffisante en soi. Pour acceder au sens originaire, le traducteur doit effectuer plusieurs lectures dans des directions differentes, contradictoires ou complémentaires, de sorte quil puisse se rendre compte que la signification de lœuvre est enrichie par le développement de son sens. Le savoir, tout comme la comprehension, est dailleurs historiquement determiné :
Comprendre le contexte dune citation, déceler les traces dune traduction, separer les lectures et différencier les points de vue, utiliser les resumés doxographiques oü se condensent les episodes, cétait déja conduire å lanalyse systématique de la constitution des connaissances, poser les premiers jaions dune historiographie intellectuelle (Bollack, 1997 : 14-15).
Lhistorisation du sens permet sa réactualisation par lincorporation å sa lecture actuelle des lectures produites dans le temps. En supprimant ľécart entre le texte-source et le texte-cible, lhistorisation épaule le traducteur dans ses efforts de restitution du sens originaire dune oeuvre, qui sest efface au fil des siedes, pour le révéler a ses lecteurs. A cette fin, le traducteur doit poursuivre parallelement ľobservation de sa propre pratique et la critique des traductions antérieures. La confrontation des lectures ďun texte se fait done accompagner dun regard herméneutique.
Accrochée å lanalyse textuelle, lapproche herméneutique ne coincide pas pour autant avec la critique littéraire. Alors que le philologue cherche le sens originaire de lceuvre afin de le transmettre de la façon la plus appropriée, le critique littéraire, qui sous-estime ľimmédiateté pour potentialiser ľimplicité, met en valeur ce qui est contenu entre les lignes. Lattitude critique vis-a-vis du texte ne signifie pas non plus quil faut subordonner la philologie å la philosophic, mais purement et simplement quil faut la completer par une reflexion. Pour étre efficace, ľexamen philologique qui cherche å combler la distance entre ľoriginal et la traduction, doit étre renforcé par une interpretation critique. Autrement dit, le philologue qui lit sans savoir doit sunir au philosophe qui croit savoir sans avoir lu (Bollack, 2006 : 12). La traduction qui prend en consideration les lectures contribuant å la comprehension de ľoeuvre et â ľélucidation de son sens s'impose comme une activité critique. Pour cette raison, la méthode interpretative mise en place par Bollack peut étre définie comme philologie critique.
3. Les défis de ľherméneutique critique
Ľherméneutique critique se distingue de ľherméneutique philosophique en cela qu'elle problématise la fusion des horizons du texte et de ľinterpréte. Rappeions que, dans Vértté et méthode, Hans-Georg Gadamer aborde cette question å deux reprises. La premiere, lorsqu'il entre dans le débat sur ľhistoricisme:
L'horizon du présent ne se forme done absolument pas sans le passé. Il n'y a pas plus d'horizon du présent qui puisse exister a part qu'il n'y a d'horizons historiques que ľon devrait conquerir. La comprehension consiste au contraire dans le processus de fusion de ces horizons soi-disant indépendants l'un de ľautre (Gadamer, 1976 : 328).
La seconde, pour préciser que la fusion des horizons se produit dans le langage (Gadamer, 1976 : 401). Grace å ľeffort de comprehension, elle enléve la distance temporelle entre le texte et son interprete, ou au moins en minimise ľimportance. Jean Bollack, pour sa part, la considere comme une entreprise trés compliquée, conditionnée par la pluralite des horizons :
Ľinterpréte saisit done toujours un écart et la difference fixée dans le texte, qui interprete ce que d'ordinaire on dit. Il у a done lieu de distinguer trois niveaux qui sans aucun doute interferent : il y a le dialogue déja inserit dans la formation originelle, puis celui, si ľon veut, que ľinterpréte entretient avec cette operation interne qu'il déchiffre (pour la comprendre), et enfin le dialogue que, plus prés de Gadamer, il conduirait avec le resultat du déchiffrement, a savoir le contenu. La « fusion des horizons » dans facte de la lecture devient une affaire complexe ; ils sont nombreux (Bollack, 2000 : 90).
Toute oeuvre est historiquement conditionnée par la culture dans laquelle elle s'insére, par son horizon et son écart par rapport å d'autres horizons. Pourtant, une fois écrite, elle s'autonomise, pour ainsi dire, des intentions de son auteur, et tout au long de sa vie indépendante elle peut étre interprétée par de nombreuses traditions, distinctes de la sienne, qui influencent immanquablement son interpretation. Cela signifie que ľacte de traduire réactualise le sens de ľoeuvre par la confrontation avec les attentes et la rhétorique du traducteur, et avec sa tradition qui peut conditionner ses choix, voire voller le sens premier de ľoeuvre par une exégése tenue pour acquise. Il est tout de méme important de noter qu'en théorie, comme en pratique, le traducteur peut rompre avec sa tradition, transgresser les pratiques interprétatives qu'elle favorise et proposer une relecture innovatrice du texte-source.
La traduction presume la collaboration entre les deux interlocuteurs que sont ľauteur et le traducteur. Or, ľ« interlocuteur n'apporte pas seulement un savoir, il apporté une signification a posteriori, au moyen d'une classification progressive, ďun pas â ľautre, d'un acquiescement a ľautre » (Boilack, 2006 : 24). Fruit des recherches conjointes du texte-source et du traducteur, la decision traductionnelle depend des competences, des connaissances et des preferences du dernier. Le texte offre des significations ; le traducteur choisit. Conformiste, lorsqu'il correspond å la doxa, ou innovateur, lorsqu'il la contredit, son choix est toujours plus ou moins contingent.
Jean Bollack illustre ses idées par des exemples concrets. Parmi les diverses lectures du poéme de Parmenide « De la nature », il met en evidence celles de Platon, de Karl Reinhardt (1916), de Jaap Mansfeld (1964), de Martin Heidegger (1969), de Rémi Brague (1987), sans oublier la sienne (2006). Et ceci, en soulignant que les lectures successives non seulement facilitent la meilleure comprehension du poéme, mais dans un certain sens l'« usent » : « De réévaluations en réévaluations, 1'usage use les textes » (Bollack, 2006 : 12). Parmi les raisons possibles de la retraduction des oeuvres anciennes se détache le besoin d'une interpretation qui vise å procurer aux lecteurs d'une autre époque un accés immédiat å leur sens :
Le texte impose une lecture neuve. Il apprend ce qui s'est dit dans ľhistoire, å ľ époque de Parmenide, avant qu'il ne figure dans une histoire de la philosophic. Ľhistoire existe pour nous, mais elle existait aussi pour ľauteur. [...] Si la lecture critique tient un röle essentiel, c'est d'abord que le poéme s'est écrit d'une certaine façon, pour étre lu de cette façon-la. Ľ écrit répond å une attente, et la suscite. Ce n'est pas seulement la communication d'un savoir, mais une initiation poétique [...] Mais la poésie ne retraduit aucune pensée ; c'est plutót la pensée qui se dégage de la poésie (Bollack, 2006 : 14-15).
Le recours aux multiples lectures aide å la comprehension de ľ oeuvre classique qui demande constamment å étre relue ; encourage de nouvelles interpretations jouissant d'une liberté consciente ; admet le renouvellement linguistique. C'est pourquoi, au lieu de se contenter d'une lecture superficielle, le traducteur doit creuser par dessous, å un niveau plus profond du texte. Cet objectif ne peut étre atteint que par une étude philologique attentive assortie d'une reflexion critique ciblée afin de réduire les pertes inevitables liées å toute reconstitution. Par consequent, ľarticulation du texte-cible est basée sur un examen minutieux du texte-source et son découpage en des unites les plus petites possibles.
Un exemple å ľappui de ces observations est fourni par les deux versions françaises du fragment « De la contemplation » de Plotin : «87t8Í Kai m)0pcO7tOl, ôtc/.v 0.G0ei)fļGOJGiv sıç то Øscopsvo, GKiáv 08copiaç Kai Xóyou T11V 7tpa?lV 7ioıo0vxaı...» (Plotin, sd, Traite30, ПЕР1 0EOPIAZ, III, 8, 31-35).
La traduction d'Emile Bréhier, fortement influencée par la tradition bergsonienne, est substantivante : «Voyez les hommes ; lorsque la contemplation s'affaiblit chez eux, ils passent ä faction, qui est une ombre de la contemplation et de la raison...» (Plotin, 1954 : 158). Les partis pris du traducteur renvoient sans doute a ľ interpretation de Plotin par Bergson : « L'action, dit-il, est un affaiblissement de la contemplation» (Bergson, 1959: 1163). La traduction d'Anne-Lise Darras-Worms (2008) est par contre dynamisante : «Voyez les hommes ; lorsque la contemplation manque de force, ils font de faction, qui est une ombre de la contemplation et de la raison...». Respectueuse de ľ original, cette version se rapproche en quelque sorte davantage du concept fondamental de Bergson, 1 'élan vital, parce qu'elle prend en consideration aussi bien ľoriginal que ses lectures consécutives, y compris celle de Bréhier.
Ľherméneutique critique se distingue néanmoins de ľherméneutique littéraire par sa comprehension du role de ľhorizon de representation. L'herméneutique littéraire sollicite la participation active du lecteur dans ľinterprétation du texte : c'est ľexégěte qui fait son choix parmi les significations potentielles. Cette attitude, valorisée par Hans Robert Jauss dans son livre majeur, Pour une esthétique de la reception, assure ľhistoricité vitale de l'æuvre. Toute æuvre s'inscrit, dės sa creation, dans un horizon d'attente, dont l'étude permet de suivre les changements historiques survenus dans la littérature et de mettre en rapport spécifique avec celle-ci le lecteur actuel ou antérieur. Mais, tandis que le lecteur antérieur est le pretexte de l'æuvre et de sa traduction, le lecteur actuel devient la raison des questions que l'æuvre suscite, et respectivement des insatisfactions que ses traductions precedentes provoquent, auxquelles on ne peut remedier que par une nouvelle traduction. On ne peut retourner å ľhorizon d'attente originaire qu'en faisant confiance å ľhorizon d'attente social, c'est-å-dire aux circonstances socio-historiques de la reception. Cela veut dire que la reconstitution historique de ľhorizon d'attente n'est que sa constitution littéraire par ľherméneutique.
L'acte de lecture étant conditionné å la fois par ľhorizon du texte et ľhorizon du lecteur, la comprehension de l'æuvre å traduire suppose la fusion des deux horizons. La mediation des horizons est assurée par la comprehension et ľinterprétation. Pour Jauss, qui entend la comprehension en elé dialogique tant dans sa genese historique que dans son actualité, la comprehension signifie deja traduction. La traduction conjugue la prise de conscience de la tradition et de la sequence des traductions antecedentes, et la mise å ľépreuve de ľexpérience personnelle du traducteur qui reoriente sans cesse le questionnement. L'intervention du lecteur
[...] fait entrer l'æuvre dans la continuité mouvante de ľexpérience littéraire, oil ľhorizon ne cesse de changer, oii s'opére en permanence le passage de la reception passive å la reception active, de la simple lecture å la comprehension critique, de la norme esthétique admise å son dépassement par une production nouvelle (Jauss, 1978 : 45).
Resultat de la convergence du texte et de sa reception, l'œuvre s'adresse aussi bien â son public immédiat qu'aux oeuvres existantes ou å venir. En assumant le point de vue de ľauteur, Bollack (2000: 113) reproche å Jauss que dans sa logique « ľauteur n'est jamais capable de lire son propre livre, étant lui-méme dépassé par ľévolution que son texte a déclenchée. Il n'y a done pas d'écriture dans le sens ďune inscription irreductible [...] Ľauteur cesse d'etre ľauteur». Il est dépassé, voire efface, par les lectures ultérieures qui contribuent au développement du sens de son œuvre, en mettant en question son statut.
Ľherméneutique critique s'oppose â toute tentative de clarifier le sens du texte â traduire. Elle ne cherche ni la comprehension univoque, ni ľexplicitation de ľimplicite, ni ľélucidation de ľopaque. Elle ne procure pas ľillusion que ľambiguité peut étre dissipée, que ľincompréhensible peut étre compris. Au contraire, selon Bollack, la traduction devrait conserver ľinexplicable dans ľoriginal ; garder ses omissions, incertitudes, inexactitudes ; transmettre « intacte » toute sa richesse nuancée. Bref, elle devrait preserver ľ obscuritas recherchée par ľauteur (Bollack, 1997 : 305-307).
4. La reconstitution traductive
Pour maintenir ľobseurité signifiante, le traducteur est censé faire le tri des significations possibles du texte å partir du contexte de sa production et des implications sémantiques voulues par son auteur, en tenant compte de ľévolution du sens, et sans se laisser influencer excessivement par son propre horizon ďattente :
[...] il n'est pas concevable que la polysémie échappe au projet, parce que le projet ľinclut et la tient. Toutes les variantes du désir interprétatif qui ne se placent pas sur cet axe qu'est le projet, historiquement situable, encore que situé par ľ interpretation seulement, sortent des limites sévéres de la philologie et de ľherméneutique. L'œuvre est inépuisable, mais suivant elle-méme seulement, selon son autonomie (Bollack, 1997 : 102).
Bollack ne croit pas que la polysémie soit voulue par ľauteur. En tant que trait distinctif de la langue, la polysémie precede ľécriture. Ľécrivain puise dans la multiplicité sémantique de sa langue. Sa preference pour une signification aux dépens des autres est déterminée par le sens qu'il veut conférer å son oeuvre. Cette decision definitive se transforme en intention : « Ľauteur tranche, il interprete les associations, mais il y a dans ľécriture quelque chose qui toujours échappe, non qu'il у ait une nécessité ontologique du non-dit, mais parce que le réseau que ľécriture explore est inépuisable » (Bollack, 2000 : 106). L'impossibilité d'une mai trise totale de la polysémie du texte qui en « fait usage » (Bollack, 2000 : 21) met a ľ ép reuve le traducteur qui se heurte â ľexigence de discerner la polysémie voulue par ľauteur de la polysémie contingente ou résiduelle. Par ailleurs, ce qui échappe a ľécrivain evoque son identification impossible avec l'æuvre dont la signification va au-delå de Xintentio auctoris aussi explicite soit-elle. Or, la delimitation compliquée des intentions de ľauteur et de l'æuvre n'indique pas une surestimation excessive de l'intention du lecteur, vu l'inépuisable réseau d'interprétations déclenchées par le texte (Eco, 2001 : 6). Les problémes de ľexpression linguistique étant å la fois des problémes de comprehension, la difference entre la langue du texte et la langue de ľinterpréte, c'est-â-dire ľécart qui les separe, acquiert une importance capitale. D'autant plus qu'il reste difficile â surmonter son horizon d'attente, sa dépendance de la propre tradition et son conditionnement par le contexte historique.
Bollack ne pense pas pour autant que les divergences entre ľauteur et le lecteur soient infranchissables. Comme déjå noté, la confrontation de ľinterprétation de celui-ci avec les interpretations des lecteurs avises appartenant å d'autres traditions, у compris celle du texte original (Bollack, 2000 : 22-23), offre un moyen pour réduire la distance historique et la dissemblance des traditions. Le travail de ľinterprétation peut étre facilité si ľon arrive å repérer ľécart entre ce qui est fixé dans le texte et ce qui est dit â son sujet. La lecture du texte-source ne dissocie pas le travail de traduction du travail ďinterprétation. Par consequent, elle agit toujours a deux niveaux : celui de la traduction et celui de ľinterprétation. Elle requiert en méme temps une historisation qui, sans se detacher du moment de la creation de l'æuvre, concourt å ľobservation simultanee de ses perceptions historiques et de ses representations contemporaines. L'historicisation radicale du sens du texte s'instaure alors comme condition de son interpretation.
Le sens originaire peut étre clarifié par un travail philologique assidu de reconstitution et ďinterprétation. Sa comprehension suppose ľapplication du cercle herméneutique : elle resulte de la combinaison habile des elements de l'æuvre au bout d'une verification patiente de chaqué hypothése admise par elle-méme, méme celle qui est liée aux détails les plus insignifiants. Cela implique perseverance et Constance, diverses lectures et comparaisons de traductions existantes en plusieurs langues. Et explique pourquoi les membres du Centre de recherches philologiques consacrent de nombreuses années å la traduction ďun fragment, dont ils proposent parfois jusqu'å une quinzaine de variantes dans leurs commentaires :
Jean Bollack cherche, en effet, a s'écarter de toute conception deductive de ľinterprétation, a savoir de ľidée que le sens ďun texte particulier şerait ľexpression plus ou moins médiatisée des possibilités sémantiques qu'offre une distance extérieure, posée comme donnée non problématique et originaire (Judėt de la Combe, 2003 : 319-320).
Convaincu que ľindividuation de ce qui est bien connu est superflue, il se méfie des lectures qui semblent conduire directement au sens auquel il cherche a parvenir â travers des éléments de prime abord inconsistants. L'objectif fondamental şerait de vaincre les resistances du texte, en faisant face aux obstacles qui empéchent d'accéder â son sens sans recourir å des explicitations. La finalité du travail herméneutique, qui consiste å « conduire le lecteur å ce point oil se pose la question du sens du sens » (Bollack, 2006 : 54), est atteinte par le dialogue herméneutique entre le texte et le traducteur. Le déchiffrement du sens, dont la traduction premiere a deja été réalisée par ľinterprétation qui n'arrive pas å épuiser tout le réseau de significations tissées par la langue, n'exclut pas son dépassement. Il peut conduire å la modification de ľhorizon d'attente du traducteur, au changement de son attitude envers le texte, å ľinvalidation des hypotheses préliminaires, conditionnées par la tradition. Parce que, bien qu'il appartienne å une tradition, tout texte reste singulier, unique, inimitable. Tout texte utilise les mots de la langue a sa maniere, en mettant en valeur certaines de leurs significations et en refoulant ďautres : « La pensée passe par le mot (par la "langue qui parle" en lui, le vocable), par le creux de sa littéralisation, hors syntaxe, hors Xarrangement, qui pourtant fait le sens dans ľinterprétation des signes d'un réseau » (Bollack, 1992 : 40).
Ľceuvre å traduire refléte done le moment du surgissement, de l'inscription et de la fixation du sens dans la langue. La traduction, quant â elle, se revele un moyen adéquat pour découvrir son sens, dans la mesure oil elle « concerne d'abord le texte de depart dans sa difference, peut-étre sa non-traductibilité, et en deuxiéme temps, la langue d'arrivée, å savoir les conditions d'y introduire ce qui ne peut pas у étre facilement dit » (Bollack, 1992 : 41). Grace å la traduction, le texte-source continue a vivre, pour reprendre les propos de Walter Benjamin, å étre interpreté, reformulé, renouvelé : il trouve son equivalent, c'est-å-dire il se présente comme un autre, en fonetion du moment de sa traduction et son insertion dans le « parcours herméneutique » (Steiner, 1978 : 277-381). Et si ľon veut démontrer la relevance de ľceuvre, on ne peut pas se contenter de dire dans la langue-cible ce que dit la languesource, mais on doit penser « aux equivalents qui existent et aux equivalents qu'on peut inventer entre ľécart et la fidélité, selon les textes, entre l'exotisme et le domestique, dans le cadre de references culturelles qui ne sont plus qu'å moitié familiéres au lecteur actuel » (Bollack, 1992 : 42). La tache du traducteur implique sa capacité å concevoir et å surmonter la distance qui separe ľceuvre et sa traduction. Ce n'est qu'ainsi qu'il pourra reconstituer l'original de façon adequate, autrement dit parcourir le ehemin de ľherméneutique de ľceuvre å ľherméneutique de la traduction. Les imperfections de cette derniére découleraient, en fait, des questions herméneutiques non résolues, du parcours herméneutique inachevé.
A partir du presuppose que le traducteur est censé transmettre le sens du texte-source dans sa propre langue, en maintenant son étrangeté, Jean Bollack ne ménage pas ses éloges â ľégard de la restitution exemplaire du texte-source dans la langue-cible, accomplie dans le brouillon de traduction de Paul Celan du quatrain introductif de « Chanson complete » de Paul Eluard :
Trois chevaux aigus
Sauf vers le nord
Trois routes perdues
Sauf vers ľaurore (Eluard, 1968 : 865)
Drei scharfe Rappen
Ausser gen Norden
Drei Strassen verloren
Ausser gen Morgen (trad. de Celan)
La version de Celan se rapproche remarquablement des vers d'Éluard, tant au niveau formel et rythmique qu'au niveau du contenu. Le lien entre le poéme et la réalité « externe » est plutôt reconstitué que reproduit. Apparemment, le poétetraducteur réussit a rétablir le sens å travers la transposition guidée par une retraduction « interne ». Sa méthode consiste, en premier lieu, å démembrer le quatrain en des unites les plus petites possibles pour les articuler, en second lieu, dans sa langue. De cette façon le sens est preservé malgré la distance, cette fois-ci linguistique et non plus historique, entre ľ auteur et le traducteur, entre la languesource et la langue-cible. Et le probléme de la reference « trouve sa solution esthétique dans le double mouvement d'une reconstitution et d'un dépassement, qui se croisent et se chassent » (Bollack, 1997 : 352).
La traduction « interpretante » de Celan « s'appuie et se libére » (Bollack, 1992 : 46) de ľ original. Elle actualise le poéme dans une « reconversion » qui posséde toutes les qualités esthétiques d'un poéme affirmé dans « son altérité, doublement situé, face au texte traduit, laissé en place et devenu lui-méme autre devant la refection, qui ľinterpréte par sa difference, et face aux principes esthétiques de la restructuration, auxquels le traducteur s'est soumis en traduisant » (Bollack, 1992 : 46). Elle fait preuve du critére établi par Bollack pour une bonne traduction : « le mouvement interprétatif qui s'est déposé dans le texte » (Bollack, 2000 : 114).
5. Conclusion
Ľherméneutique critique fait fusionner, d'une part, ľherméneutique comme technique de comprehension des textes, instaurée par Friedrich Schleiermacher, et la critique qui s'interroge sur la relation entre le texte et le contexte (Judeţ de la Combe, 2003 : 318) ; et ďautre part, ľherméneutique de la lecture et de la traduction, ľinterprétation philologique et philosophique. Doublement critique par rapport a l'æuvre interprétée et par rapport aux interpretations precedentes de cette oeuvre, elle permet de faire sortir la traduction des antinomies traditionnelles afin de la focaliser sur la recherche du sens, la vision du monde et le rapport avec ľétranger. En resume, Jean Bollack considere la traduction comme une experience dialogique, fondée sur la comprehension de ľ autre et le respect de sa pensée, et ľherméneutique comme fart de la mise â distance.
Pour acceder au sens de ľ oeuvre, le lecteur doit entreprendre un dialogue avec elle et, â partir de ses propres histoire, experience, horizon d'attente et, en tenant compte de ses autres interpretations, conditionnées par ď au tres horizons culturéis, essayer de se rapprocher autant que possible de son sens originaire. Dans cette perspective, le lecteur privilegié d'un texte est le dernier parce qu'il peut beneficier de toutes les lectures antérieures. Il ne faut pas oublier toutefois que le texte qu'on traduit pour comprendre s'interprėte lui-méme, en s'écrivant. Le traducteur competent doit déchiffrer notamment cette premiére lecture effectuée par le texte, en se servant de toutes ses lectures ultérieures. Le sens şerait alors une sorte ď interpretation des interpretations. Ainsi,
(1.) Ou bien fon interprete avant. On traduit un sens déjå trouvé, circonscrit hors traduction.
(2.) Ou bien fon interprete en traduisant, un moyen de la traduction. On risque de perdre le sens, pour trouver autre chose (on ne sait pas quoi).
(3.) Ou bien on montre au moyen ď une interpretation nouvelle que fon interprete, ou que fon n'interprete pas, et que la traduction fait autre chose que le texte.
(3.) apporté la demonstration de (2.), par le passage å la limite. La difference radicale s'affirme contre ľ alteration (Bollack, 1992 : 46).
Les etapes successives de la méthode Bollack peuvent étre synthétisées comme il suit : retour å ľorigine ; maintien de ľobscurité signifiante de f original ; historisation radicale ; ouverture de ľ ancien vers ľactuel ; renouvellement de ľ oeuvre par la traduction. Mais elle présente néanmoins deux moments equivoques : Peut-on avoir la certitude que la version retenue par le traducteur parmi toutes les hypotheses interprétatives soit la bonne ? Ou que fambigu'íté du texte-source soit vraiment recherchée par son auteur ?
* Artículo recibido el 5/05/2020, aceptado el 15/09/2020.
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Abstract
El artículo intenta presentar los desafíos de la hermenéutica crítica de Jean Bollack. Este método de traducción recomienda que, para ser eficaz, el examen filológico que busca cerrar la distancia entre la obra y su traducción debe ser reforzado por una interpretación crítica. Al no separar el trabajo de traducción del trabajo de interpretación, la lectura del texto fuente requiere su historización radical que, sin ignorar el momento de su creación, tiene como objetivo conocer sus representaciones ulteriores. En resumen, la historización del significado del texto se convierte en la condición de su interpretación. Situada en la doble tradición del autor y del traductor, la hermenéutica crítica confronta sus horizontes de expectativa en la búsqueda del significado del original. Históricamente determinada, ofrece una aproximación crítica al texto para traducir, que toma en consideración su recepción en varios momentos y el «conflicto de interpretaciones» causado por sus lecturas.




