Résumé : 6 juin 1905. Pierre Curie et Marie Curie-Sktodowska sont reçus a la cour du roi de Suede pour y recevoir le prix Nobel. Mais seul Pierre Curie est invité a monter sur l'estrade; tandis qu'il évoque les longs travaux qui leur ont permis d'établir l'existence de deux nouveaux éléments, le polonium et le radium. Marie Curie, assise, reléguée dans l'assistance, se remémore cette aventure passionnante que fut la découverte de la radioactivité, et de ses mystérieuses propriétés...
10 décembre 1911. Veuve depuis 1906, Marie Curie, sur l'estrade a Stockholm, revendique avec vigueur sa prééminence dans le domaine de la radioactivité, explique ses multiples travaux sur le radium, devenu un grand espoir dans la guérison du cancer, par la «curiethérapie». Les obstacles ont été nombreux sur la route de Marie Curie, pionniere d'une grande audace intellectuelle ayant ouvert la voie aux recherches des savants atomistes. Et de nos jours, quelles sont les possibilités pour une femme, de s'engager dans la voie scientifique et d'y mener une carriere en rapport avec ses ambitions légitimes? Question épineuse en cette période de déficit européen de jeunes s'engageant dans des études scientifiques.
Mots-clés: radioactivité, polonium, radium, curiethérapie, femme, scientifique.
Abstract: June 6th, 1905. Pierre Curie and Marie Curie-Sktodowska are received at the Swedish court to be awarded the Nobel Prize. However, only Pierre Curie is invited to go up to the podium. As he evokes the long hours of work that enabled them to establish the existence of two new elements - polonium and radium - Marie Curie, sitting in the audience, recalls the exciting adventure of the discovery of radioactivity and its mysterious properties...
December 10th, 1911. Marie Curie, widowed in 1906, is in Stockholm again. At the podium, she asserts her pre-eminence in the field of radioactivity and presents her extensive work on radium, which has become a source of great hope as a potential cure for cancer through "curie therapy." Marie Curie's intellectual boldness helped to underpin the research of atomic scientists, and yet she came across many obstacles during the course of her work. In the present day, what are the chances of a woman entering a scientific field and going on to have a career in proportion to her legitimate ambitions? This is a particularly vexed question during a period when fewer and fewer young Europeans are pursuing scientific studies.
Keywords: radioactivity, polonium, radium, scientific, woman, "curiethérapie".
6 juin 1905
La salle est bruissante de mille conversations, brillamment illuminée, trop éblouissante pour nos chercheurs discrets, travaillant habituellement sous la faible et douce lumiere de leur lampe, favorable aux échanges a mi-voix dont ils sont coutumiers. Il y a la une estrade vers laquelle on entraîne Pierre Curie, tandis que l'on mene doucement Marie Curie-Skłodowska vers le parterre, au milieu des belles dames de la cour de Suede parées de leurs magnifiques diamants. Ils calculeront plus tard, a nouveau réunis dans le calme de leur chambre, le nombre de laboratoires que l'on pourrait construire avec la richesse que ces bijoux représentent... Les mathématiques ne perdent jamais leurs droits avec eux, et leur désir d'avoir un vrai laboratoire est une frustration toujours présente.
Marie s'assied sans un mot, car personne ne lui demande rien, ne lui demandera rien. Et cela ne surprend personne, dans le contexte de l'époque, pas méme Pierre ? On ne sait, mais en tout cas, lui seul parle, accréditant malgré lui, car c'est un homme integre, la théorie, longtemps entretenue, que Marie n'a été dans cette formidable aventure que l'assistante de son mari. Peut-il en étre autrement a cette époque quand on est femme ?... Bien sÛr, il va citer Marie dix fois, se cite cinq fois, et dit «nous» a cinq reprises. Mais Marie est muette au milieu des belles dames.
Tandis que son mari évoque leur longue, interminable quéte de l'élément mystérieux si bien caché dans la pechblende, les images des laborieux et épuisants travaux qui l'ont accompagnée défilent dans son esprit Au début cela commence comme un jeu, apres l'étincelle de leur rencontre: une jeune polonaise éprise de Sciences et un savant Français qui n'avait plus que la recherche scientifique pour horizon. puis, apres beaucoup d'hésitations de part et d'autre, l'engagement entre deux étres qui, se correspondant tellement, comprennent qu'ils ne pourront pas se passer des mille liens qui les unissent déja. Suit une année de bonheur, a découvrir a deux la campagne française sur leurs bicyclettes, nouveauté qui fait fureur a l'époque. Bonheur des discussions, des échanges sans fin sur toute cette nature qui les passionne. Vie familiale et amicale riche, heureuse, harmonieuse. Nous sommes en 1895.
Mais soudain tout se déclenche. Tout d'un coup, en cette fin du 19eme siecle, dans l'histoire des Sciences, quel bouleversement dans l'approche des secrets de la matiere! Premier événement: en 1895, l'allemand Röentgen découvre les rayons X, par hasard, d'ou leur nom. Grace a eux on peut voir l'intérieur du corps humain! Leur succes dans le public est immédiat, et donne d'ailleurs lieu a toute sorte d'exces! Ce phénomene surprenant, et pour le moment incomprehensible, entraîne une activité fébrile des chercheurs dans le domaine des rayonnements, des phénomenes de phosphorescence, de luminescence. Quelles peuvent étre leurs causes? Comment les reproduire ?
Le physicien Henri Becquerel, a partir d'une hypothese qui se révelera inexacte, entreprend d'étudier des sels d'Uranium, a partir de son minerai, la pechblende. Il pense qu'une longue exposition de ce minerai au rayonnement solaire va peut-étre faire apparaître des rayons X. Or, l'expérience n'ayant pu se réaliser pendant trois jours de temps pluvieux, quelle n'est pas sa surprise, en développant la plaque photographique support de son sel d'Uranium, maintenu trois jours dans un tiroir, de voir que celle-ci est voilée! Ces rayons, qui ne peuvent étre issus que du sel d'Uranium, sont-ils une découverte ? Becquerel peut seulement affirmer que l'Uranium émet spontanément ce qu'il appelle le «rayonnement uranique». Apres une communication a l'Académie des Sciences, qui passe inaperçue, il rédige une note soigneuse, détaillée, de ses observations mais ne peut aller plus loin...
Or Marie, dans son habituel désir d'aller de l'avant, a décidé de devenir docteur en Sciences, meme si aucune femme ne porte ce titre en Europe. Cherchant un sujet de these, elle parcourt des publications, et, celle de Becquerel, inexpliquée, lui parait a la fois saisissante et prometteuse pour une recherche. Elle décide d'étudier ces rayons uraniques, qui s'accompagneraient de l'électrisation de l'air ambiant. Car elle a la possibilité de mesurer tres précisément des charges électriques, grâce au merveilleux instrument inventé par son grand homme: l'électrometre a quartz piézo-électrique.
La passionnante aventure de cette chercheuse opiniâtre est commencée: rechercher d'abord si, sur les 82 éléments constitutifs de la Nature que l'on connaît a son époque, d'autres que l'uranium donneraient des rayons «uraniques». Et apres une série de recherches infructueuses, un jour Marie trouve qu'il en est ainsi de l'élément thorium ! C'est a ce moment-la qu'elle appelle radioactivité, tout simplement, cette propriété commune a deux éléments de la classification de Mendeleiev.
Mais les questions vont vite devenir passionnantes: Marie veut simplement au départ faire des comparaisons de l'intensité des charges provoquées dans l'air par l'uranium et le thorium. Elle reprend de la pechblende, et s'aperçoit que sa radioactivité, traduite par l'électrisation ambiante, est quatre fois plus importante que celle d'un sel d'uranium contenant la meme quantité de cet élément. Elle croit d'abord a une erreur, fait et refait plusieurs mesures, mais finit par se dire, avec son audace intellectuelle habituelle, qu'il y a dans la pechblende un élément radioactif, inconnu, en proportion tellement faible qu'il a échappé jusque la aux recherches des chimistes...
Le 12 avril 1898, Marie, sous le nom de Marie Skłodowska-Curie, se décide a faire présenter par son ancien professeur Gabriel Lippmann, une breve communication a l'Académie des Sciences : les minéraux qu'elle a examinés doivent contenir un élément inconnu, encore plus radioactif que l'uranium de Becquerel. La communication laisse indifférente la communauté scientifique. Le 14 avril, son mari abandonne ses propres recherches pour aider Marie. Leurs écritures vont désormais se meler quotidiennement. Début juillet, ils arrivent a un échantillon qui a une radioactivité 400 fois plus forte que l'uranium !
Le 13 juillet 1898, ils rédigent une note annonçant l'existence d'un nouvel élément, le «polonium», (numéro 86 de la classification de Mendéleiev), nom donné en hommage au pays d'origine de Marie, puis ils partent en vacances... Mais ils commencent a penser qu'il y a un deuxieme élément inconnu dans leurs résidus radioactifs !
Aussi, des la rentrée, un peu reposés, ils se mettent avec ardeur a chercher «l'autre» perle rare. Et ils lui donnent son nom des le début décembre 1898: Le radium, qui va éclipser tres vite le polonium. En effet sa radioactivité se révelera etre un million de fois plus importante que celle de l'uranium. Le 26 décembre 1898 Lippmann fait a nouveau pour les Curie une communication a l'Académie des Sciences, émettant l'hypothese d'un deuxieme nouvel élément (numéro 88 de la classification de Mendeleiev).
Cette fois-ci la communauté des chercheurs se passionne, mais il faudra la convaincre... Il faudra done isoler cette substance, certainement extremement rare sur terre, afin de prouver qu'elle existe. Quel défi.... Ils calculent que, pour cela, il leur faudra partir de tonnes de pechblende, qu'une entreprise autrichienne veut bien leur céder, a titre de résidu, apres en avoir retiré l'uranium. Et ou travailler ? Il leur faut beaucoup de place pour traiter ces tonnes de minerai ! Ils finissent par obtenir l'autorisation d'occuper un vieux hangar délabré au fond de la cour de l'Ecole. Les conditions de travail des chercheurs sont souvent tres précaires, mais la tous les records sont battus! Le bâtiment est en bois, ouvert a tous les vents, le sol est en terre battue, le toit fuit. Quelques vieilles tables vermoulues et d'anciens fourneaux le meublent. Mais ils peuvent disposer de la cour pour entreposer le minerai de pechblende. Ces deux courageux se mettent a l'œuvre, toujours avec le précieux électrometre de Pierre, et les vieux chaudrons qui sont encore dans ce réduit... Commence alors un travail de forçat, qui confond l'imagination. Il s'agit donc d'éliminer successivement, par des opérations chimiques sélectives, tous les autres éléments présents dans la pechblende, pour qu'il ne reste que l'élément miraculeux... Marie remue dans des gros chaudrons des litres de solutions, a l'aide d'un lourd bâton de métal, environnée de vapeurs âcres. Au fur et a mesure que les éliminations se font, la radioactivité du résidu se fait extraordinairement forte ! On passe ainsi, jour apres jour, de sac en sac de pechblende, dans une atmosphere rendue étouffante par la chaleur et les vapeurs acides, a des fonds de capsules de poudre de plus en plus radioactive.
Et au bout de 45 longs mois de labeur, Marie maintenant possede un décigramme de sel de radium. En fait, il était présent, tapi, caché dans la pechblende dans une proportion de quelques millioniemes ! Mais il est loin d'avoir livré tous ses secrets, que Pierre et Marie essaient de percer ! C'est alors que Marie va émettre une hypothese hardie qui ouvre la voie a la physique nucléaire.
En effet, on est bien loin a cette époque de nos représentations actuelles de l'atome. On se le représente comme une sorte de pudding, ou évoluent des électrons, (dénommés officiellement en électricité seulement en 1894). C'est le «modele du plum-pudding». Marie a l'audace d'imaginer qu'il se passe quelque chose dans le cœur meme de l'atome. Car d'ou vient la chaleur que ce corps paraît dégager spontanément, alors que sa masse ne semble pas varier ? Que signifie cette «émanation» comme on l'appelle alors, ce gaz qui l'accompagne et qui parait doté de propriétés analogues aux siennes (il s'agit en fait de la transmutation de radium en radon)? Et pourquoi les corps avec lesquels le radium rentre en contact semblent-ils devenir radioactifs a leur tour ? Nous sommes encore a la préhistoire de l'atome, mais bientôt tout va se précipiter, car la communauté scientifique du monde entier s'engouffre maintenant derriere les travaux des Curie et de ceux qui les ont déja rejoints...
Au mois de juin 1903, Marie, amaigrie de sept kilos, a réussi, malgré tout son labeur, a finir de rédiger sa these. Il est surréaliste de se représenter notre jeune mere trentenaire, qui est en France depuis seulement quelques années, expliquer d'une voix douce mais ferme, devant un parterre de savants accourus de toutes parts, ses découvertes, cette nouvelle science ! Elle détaille posément toutes les étapes de son travail, répond aux questions du jury avec réserve et modestie a son habitude, mais aussi en montrant une maîtrise parfaite de son sujet. Quel moment mémorable pour ses auditeurs, quel moment extraordinaire pour toute femme d'aujourd'hui devant cette pionniere!
Cette renommée ne leur apporté pas pour autant la satisfaction de leurs légitimes demandes : une chaire en Sorbonne pour Pierre, et un laboratoire digne de ce nom. C'est de l'étranger que vont venir les premiers signes officiels de reconnaissance. Tout d'abord d'Angleterre, qui leur remet la médaille «Davy». Puis c'est de Suede que la gloire s'annonce officiellement. Le 10 décembre 1903, de Stockholm arrive l'annonce du prix Nobel attribué a Henri Becquerel et aux époux Curie, pour l'ensemble des découvertes sur la radioactivité. Ils pourront enfin se faire aider au laboratoire, sur leurs propres deniers ! Car ils sont toujours dans l'attente de collaborateurs, de crédits, d'une chaire de Physique pour Pierre. Comment ne pas éprouver de l'amertume, sentiment hélas fréquent chez les chercheurs, devant cette non- reconnaissance de leurs besoins ? D'autant plus que Pierre, a la grande inquietude de Marie, est de plus en plus las, exténué semble-il, la cause essentielle de sa fatigue étant évidemment sa constante exposition au rayonnement du radium. Becquerel se rend donc seul a Stockholm en 1903...
Mais voila qu'un grand espoir est en train de se confirmer: La «curiethérapie», qui deviendra la «radiothérapie», fait ses débuts en médecine pour soigner les cancers. Aussi une idée germe des cette époque : unir, en un seul lieu, les efforts de la science et de la médecine pour vaincre le cancer, nommé « fléau du siecle» a Berlin par une coordination de gouvernements de 13 pays.
En 1904 l'industrie du radium aussi est entrain de naître. La encore, les Curie se montrent fideles a leur idéal humaniste; ils choisissent de ne pas déposer de brevet et de continuer a publier tous les résultats de leurs multiples recherches, comme il était alors d'usage dans une communauté scientifique qui s'honore.
L'année 1904, qui voit la naissance de leur fille Eve, est harassante pour nos deux savants fatigués, et sollicités de toutes parts. Le 6 juin 1905 seulement, ayant repris quelques forces, ils se décident a se rendre a Stockholm pour recevoir leur prix.
Si le récit que fait Pierre, sur l'estrade, est bien a l'image de l'entente totale de ce couple fusionnel, en revanche, il convient bien de rendre a Marie ce qui lui est dÛ: c'est elle qui a travaillé opiniâtrement, penchée sur ses chaudrons, au dessus des vapeurs étouffantes, pendant presque quatre ans, pour l'extraction de ce nouvel élément, et surtout, répétons-le, c'est elle qui a imaginé qu'il se passait quelque chose au cœur de l'atome, ouvrant une voie royale aux savants atomistes...
10 décembre 1911
La frele silhouette de Marie se fraye un chemin vers l'estrade. La salle est toujours aussi lumineuse, mais elle est seule, cette fois-ci, seule depuis le sombre jour d'avril 1906 ou la foudre est tombée sur elle, quand elle a perdu celui qui était a la fois son mari, son compagnon, son collaborateur, et sa raison d'etre sur ce sol de France. Seule, elle a dÛ faire face a l'éducation de ses filles, seule elle s'est trouvée propulsée professeur a la Sorbonne, premiere femme a occuper un tel poste. Seule, elle a repris le chemin du laboratoire, et seule elle a recommencé a noircir de chiffres les fameux carnets ou leurs écritures s'entremelaient...
Mais amis et collaborateurs sont nombreux a entourer, encourager cette femme digne et opiniâtre, qui est maintenant animée par la volonté impérieuse d'établir sa prééminence dans l'histoire de la radioactivité. Elle s'entoure de chercheurs qui la vénerent, l'appelant «la patronne», et travaillent d'arrache-pied pour obtenir enfin, en 1910, soit douze ans apres l'annonce de l'existence de cet élément, quatre décigrammes de radium pur, blanc (qui noircit tres vite a la lumiere). C'est alors qu'une certaine presse, misogyne et xénophobe, va s'attaquer a sa vie privée, au risque de l'anéantir. Quand soudain éclate la grande nouvelle: Le Nobel de Chimie est attribuée a Marie Curie! Un deuxieme Nobel! La presse unanime s'extasie, cette fois-ci c'est la gloire incontestable.
Marie est seule sur l'estrade, et cette fois-ci elle revendique, devant la famille royale, les scientifiques et les journalistes, tous ses travaux avec insistance. Elle revient meme sur le premier Nobel, et apres un hommage a son mari, reprend les acquis de leurs premieres expériences. Beaucoup de laboratoires travaillent maintenant sur la radioactivité, mais il n'est pas question de lui enlever l'exclusivité de ses recherches. Elle dit «je», elle dit «mes mesures», «mes résultats»... Ses multiples publications, toujours généreusement mises a la disposition de la communauté scientifique, valident ses assertions. Il est bien précisé que ce deuxieme prix est relatif a «l'avancement de la chimie pour la découverte des nouveaux éléments radium et polonium. l'étude de leur nature et de leurs composés». Quelle magnifique tribune que cette estrade pour montrer sa valeur inestimable au monde entier, et faire taire définitivement les dernieres voix qui s'acharnent a diminuer ses mérites. La petite polonaise, premiere femme a etre admise en tete de liste a la licence de Sciences Physiques, premiere femme docteur en sciences, premiere femme admise a un poste d'enseignement a la Sorbonne, premiere, et seule femme, a recevoir deux prix Nobel, est maintenant une grande dame au faîte de sa gloire scientifique, pendant qu'une certaine presse obscurantiste s'acharne encore sur elle! Quels étaient ses torts pour ces individus? A vrai dire, ce qu'ils n'admettaient pas, c'est d'abord, qu'étant femme, elle ait réussi mieux que des hommes, puis qu'elle soit étrangere, elle qui allait devenir citoyenne du monde.
Mais dans le meme temps, d'autres sont a l'œuvre pour l'aider a réaliser, hélas de maniere posthume, le reve «humanitaire et scientifique» de son époux: un laboratoire digne de ce nom a la campagne. Un généreux don a été fait a l'Institut Pasteur, de trente millions de francs or, par un donateur désireux de se lancer dans la bataille contre le cancer. Marie Curie a été pressentie des 1907 par le Directeur de l'Institut Pasteur. En 1909 il est décidé que ce laboratoire travaillera avec une collaboration étroite entre physiciens et médecins. Les travaux de construction de l'Institut du Radium, rue d'Ulm, commencent en 1911, surveillés de pres par Marie. Ils devront etre finis en 1914, moment ou éclate la Grande Guerre, qui accroîtra encore l'aura de Marie avec ses «petites Curie», impulsant notre imagerie médicale moderne.
Quelques reflexions.
La bataille de Marie pour s'imposer nous amene a nous poser de nos jours la meme épineuse question. Nous sommes évidemment navrés devant toutes les difficultés qu'elle a rencontrées pour affirmer sa prééminence, pour faire reconnaître, accepter son génie, surtout quand on se rappelle que dans le courant de cette meme année 1911 on lui a refusé l'entrée a l'Académie des Sciences! Mais on conçoit que le contexte de l'époque vis-a-vis des femmes l'explique un peu. Or les choses ont-elles réellement changé aujourd'hui? Les memes questions obsoletes semblent toujours se poser! Une femme peut-elle faire des Sciences? Une femme a-t-elle les capacités cérébrales pour raisonner scientifiquement? Une jeune fille a-t-elle la force, l'énergie pour mener de «dures» études scientifiques? Meme les appréciations des enseignants font apparaître les bonnes éleves filles comme «sérieuses, travailleuses, appliquées», tandis que les bons éleves garçons sont qualifiés de «brillants»!
Cette année, l'Education Nationale française, devant le déficit croissant, inquiétant de scientifiques dans notre pays et en Europe, annonce, en ce début d'année 2011, un «Plan Sciences», dans lequel un paragraphe recommande d'«inciter les jeunes filles a s'engager dans les métiers scientifiques et techniques», évidemment vivier possible pour pallier ce déficit. Quel est l'état des lieux? Pour des raisons dites pudiquement dans le plan «psychologiques et sociales», il y a seulement 39% de filles dans les terminales a caractere scientifique. Apres le baccalauréat cela s'aggrave: 30% seulement sont des filles. Il ne sera pas trop d'une «convention interministérielle de huit ministeres» pour essayer de sortir des stéréotypes et lutter contre les idées reçues...Des questionnaires dévoilent que les filles elles-memes semblent avoir intériorisé l'idée que les Sciences sont plutôt un domaine pour les garçons, et de plus qu'elles craignent la rivalité brutale avec ceux-ci. Plus tard, dans le milieu du travail, les femmes déplorent et appréhendent la concurrence pleine d'embÛches avec les hommes, et de plus dénoncent le fameux «plafond de verre» bloquant injustement leurs légitimes ambitions et prouvant cette ségrégation. Enfin, on comprend que c'est loin en amont qu'il faudrait déja travailler, au niveau de la famille, de l'environnement social, dans les exigences éducatives et meme le choix de jouets différenciés des la petite enfance... La route risque d'etre longue, sur les traces de Marie Curie-Skłodowska la pionniere...
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© 2011. This work is published under https://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/3.0/fr/ (the“License”). Notwithstanding the ProQuest Terms and Conditions, you may use this content in accordance with the terms of the License.
Abstract
Résumé : 6 juin 1905. Pierre Curie et Marie Curie-Sktodowska sont reçus a la cour du roi de Suede pour y recevoir le prix Nobel. Mais seul Pierre Curie est invité a monter sur l'estrade; tandis qu'il évoque les longs travaux qui leur ont permis d'établir l'existence de deux nouveaux éléments, le polonium et le radium. Marie Curie, assise, reléguée dans l'assistance, se remémore cette aventure passionnante que fut la découverte de la radioactivité, et de ses mystérieuses propriétés... 10 décembre 1911. Veuve depuis 1906, Marie Curie, sur l'estrade a Stockholm, revendique avec vigueur sa prééminence dans le domaine de la radioactivité, explique ses multiples travaux sur le radium, devenu un grand espoir dans la guérison du cancer, par la «curiethérapie». Les obstacles ont été nombreux sur la route de Marie Curie, pionniere d'une grande audace intellectuelle ayant ouvert la voie aux recherches des savants atomistes. Et de nos jours, quelles sont les possibilités pour une femme, de s'engager dans la voie scientifique et d'y mener une carriere en rapport avec ses ambitions légitimes? Question épineuse en cette période de déficit européen de jeunes s'engageant dans des études scientifiques.