It appears you don't have support to open PDFs in this web browser. To view this file, Open with your PDF reader
Abstract
Les migrations, la sélection de l’habitat et les rythmes d’activité de la truite commune Salmo trutta ont été largement étudiés en Europe, en Amérique du Nord et dans d’autres régions où l’espèce a été introduite. La plupart des études repose sur l’utilisation de la pêche électrique et du marquage-recapture, des méthodes qui donnent un aperçu valable de l’écologie des populations, mais peu d’indications en continu sur la biologie des individus. La plupart des techniques d’observation directe comme par exemplela plongée subaquatique, autorisent ce suivi précis et continu, mais sont limitées par les conditions environnementales et ne permettent pas d’étudier des individus qui effectuent de grands déplacements. L’objectif de cette thèse est d’étudier les modes d’utilisation du temps et de l’espace de la truite commune par biotélémétrie, une technique qui permet un suivi continu et individuel des poissons sous (presque) toutes les conditions environnementales.
D’octobre 1995 à décembre 1998, 42 truites (26,0-57,0 cm LF) ont été radio-pistées dans l’Aisne, une petite rivière salmonicole relativement bien préservée du sous-bassin de l’Ourthe (bassin de la Meuse) ainsi que dans l’Ourthe, une rivière typique de la zone à barbeau, modifiée par les activités humaines (barrage, rectification des rives). Après une étude de faisabilité qui a testé l’innocuité de la procédure de marquage sur le comportement et le statut social de truites en rivière artificielle, nous avons marqué les truites du milieu naturel avec un émetteur radio à antenne interne, implanté chirurgicalement dans la cavité intrapéritonéale. Les truites ont été quotidiennement positionnées jusqu’à ce que la batterie de l’émetteur soit épuisée. Une seconde étude méthodologique a montré que le pistage quotidien est nécessaire pour estimer correctement le domaine vital et la mobilité, ainsi que pour comparer les observations entre saisons. Les émetteurs étaient équipés de circuits à activité ou de thermistors, autorisant, respectivement, des mesures détaillées des variations d’activité des truites lors de cycles de 24h ou la détermination précise des sites sélectionnés par les truites dans des habitats à contraste thermique, comme des zones de confluence avec des résurgences ou de petits affluents.
Les truites de l’Aisne et de l’Ourthe ont montré des patrons de mobilité contrastés au cours du cycle annuel. Les migrations de reproduction vers les frayères, souvent localisées dans les petits affluents, s’étendaient sur plusieurs dizaines de km. De 1996 à 1998, ces migrations ont exclusivement débuté lors de variations combinées du niveau d’eau et de la température de l’eau, dans une gamme thermique de 10-12°C, qui correspond à la limite inférieure du taux de croissance optimum de l’espèce. Il s’agit probablement d’une réaction adaptative face à un environnement à caractère imprévisible, qui favorise la reproduction plutôt que la croissance. La vitesse de migration était proportionnelle à la longueur des trajets, et la durée de résidence sur le site de frai était très variable selon les individus. A plusieurs occasions, les migrations de reproduction furent suivies d’un « homing » post-reproducteur très précis (au m2 près), qui met en évidence l’importance du gîte « estival » chez la truite. Durant l’hiver, le printemps etl’été, les truites ont fait preuve d’une mobilité assez réduite, mais des mouvements de grande amplitude ont été occasionnellement observés, surtout dans l’Ourthe lors d’élévations printanières de la température.