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RAPHAËL JOTTERAND AVEC L’ATS
Pas sûr que les manifestations devant les portes du Grand Conseil prendront fin la semaine prochaine. Après deux premières journées de débat autour du budget 2026, les députés vaudois ont approuvé mercredi soir en première lecture le décret introduisant une contribution de crise prélevée sur les salaires des employés de l’Etat. Ce prélèvement de 0,7% sur le salaire brut des fonctionnaires à partir de la classe salariale 5 est l’une des mesures contestées depuis plusieurs semaines par des milliers de manifestants.
Si la gauche s’est opposée de manière unanime à cette contribution de crise, les députés de droite, qui sont majoritaires au Grand Conseil, ont décidé d’accepter la proposition gouvernementale. Notons toutefois que ce vote devra encore être confirmé la semaine prochaine lors du deuxième débat. Plusieurs élus PLR et UDC ont principalement justifié cette baisse pour «redresser les finances de l’Etat» et parce qu’elle «ne constitue pas une baisse massive de salaire, mais une augmentation plus faible pour 2026». D’autres députés ont aussi rappelé les conditions plutôt favorables auxquelles les enseignants, par exemple, sont habitués, notamment en ce qui concerne la caisse de pension de l’Etat de Vaud.
A gauche, la pilule ne passe pas. Ces économies de 23,5 millions faites sur le dos des salariés de la fonction publique sont jugées injustes. Le socialiste Julien Eggenberger a parlé d’une mesure «punitive» à l’encontre de ceux «qui ne sont pas à l’origine des déficits». Bien que plus posés et pertinents que ceux de mardi et mercredi matin, les débats ont confirmé un fossé entre la droite et la gauche. Le compromis semble toutefois loin d’être acquis.
Plusieurs amendements déposés
Divers amendements ont été proposés. Notamment par les Vert’libéraux qui ont demandé de préserver les classes salariales 1-9, contre les classes 1-5 dans le projet initial. Cet amendement a été refusé d’une voix. Un autre amendement demandait une ponction de 2,1% l’an prochain, mais seulement sur les montants au-delà des 100 000 premiers francs de salaire. Il a aussi été écarté.
En revanche, le Grand Conseil a largement soutenu l’amendement de l’écologiste David Raedler pour inclure la rente à vie des anciens conseillers d’Etat à cette contribution de crise. Idem pour celui du PLR Alexandre Berthoud qui estime que les fonctionnaires ne doivent pas être imposés sur le montant prélevé. A noter toutefois que la donne pourrait changer au deuxième débat. L’UDC a notamment annoncé qu’elle demanderait de renoncer à cette contribution de crise, en échange d’une suppression des annuités 2026 pour les classes 10 à 18.
L’autre sujet chaud du jour concernait la suppression des décharges de fin de carrière pour les enseignants (six périodes hebdomadaires à répartir lors des trois dernières années). Le Conseil d’Etat et la droite ont rappelé qu’une compensation était prévue, à savoir l’octroi d’une sixième semaine de vacances pour les plus de 60 ans. Frédéric Borloz, ministre chargé de la formation, s’est dit «étonné de la réaction extrêmement vive» des enseignants et syndicats à ce sujet. «On parle d’un million de francs d’économie. Ce n’est pas capital. Je ne vais pas retirer cette modification de la loi à ce stade, mais nous apprécierons le budget dans sa globalité au terme du premier débat.»
Le Chablaisien a encore précisé que le Conseil d’Etat avait tenté de discuter avec les syndicats. En vain. «Nous avons proposé, lors de la deuxième rencontre, cette mesure de vacances comme compensation. Mais ils ne voulaient entrer en matière sur rien.»
Allocations familiales
Parmi les autres points abordés mercredi, la majorité de droite a encore eu gain de cause, mais cette fois-ci en faisant capoter une mesure d’économie voulue par le Conseil d’Etat. Celui-ci avait imaginé une hausse des allocations familiales de 40 francs par mois et par enfant pour freiner les hausses des primes maladie pour les familles et, par ricochet, réduire les subsides payés par l’Etat pour ces mêmes primes.
Gains immobiliers
L’économie annuelle pour le canton a été estimée à 19,6 millions de francs. La gauche y a également vu une opportunité de redonner du pouvoir d’achat à la classe moyenne qui ne touche pas de subsides, mais aussi à faire participer les entreprises à «l’effort collectif». La droite n’en a toutefois pas voulu, notamment en raison du coût engendré pour les employeurs.
Les débats ont été interrompus à 22h, alors que les députés débattaient d’une autre mesure décriée: une nouvelle répartition, prévue sur deux ans, de l’impôt sur les gains immobiliers entre le canton et les communes. Cette mesure, qui ferait perdre 39 millions aux communes, devrait logiquement être refusée, mais les députés n’ont pas encore eu le temps de voter.
Les discussions se poursuivront mardi prochain. Encore quatre journées sont prévues jusqu’au 17 décembre pour tenter de voter un budget pour l’an prochain. Les longs échanges du jour, parfois hors sujet, laissent penser que mettre un budget sous toit avant la fin de l’année ne sera pas une mince affaire. Les députés sont prévenus. Pour y parvenir, ils devront trouver de bons compromis entre le premier et le deuxième débat ou renoncer à de nombreuses heures de sommeil.
Copyright Le Temps SA Dec 5, 2025