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RAPHAËL JOTTERAND
Quel travailleur applaudirait son employeur en apprenant qu’une partie de son salaire allait être rabotée l’année prochaine? La colère de la fonction publique vaudoise est tout à fait légitime. Se battre pour son métier, ses conditions de travail et son avenir est un acte honorable.
Une fois que c’est dit, nous pouvons aussi porter un regard critique sur ces grèves et manifestations, qui durent désormais depuis plusieurs mois. En première ligne, les enseignants monopolisent la grande majorité des discussions. La preuve: la semaine dernière, le débat sur la décharge de fin de carrière s’est étendu pendant près de deux heures au Grand Conseil. Une mesure qui, rappelons-le, est compensée par une semaine supplémentaire de vacances en dehors du temps scolaire.
Autre point sensible: la contribution de crise de 0,7% imposée aux fonctionnaires. Un vrai scandale, selon certains. Pourtant, seuls 15% des employés verront leur salaire stagner ou diminuer. La majorité continuera de bénéficier des annuités, qui n’ont pas été touchées.
Dans le privé, beaucoup de trava i l l eurs n’ont pas vu leur salaire augmenter depuis des lustres. Pour 2024 et 2025, le Conseil d’Etat vaudois (à majorité de droite) a octroyé la pleine indexation aux salaires de la fonction publique. A l’heure où les annonces de licenciements se succèdent partout en Suisse, le Département de la formation continue de croître, avec 240 EPT supplémentaires pour 2026.
A cela s’ajoutent une caisse de pension aux conditions attractives et une gestion très souple des 14 semaines de vacances scolaires. Bien évidemment, résumer les enseignants à des tire-au-flanc est mensonger. Certaines semaines de vacances sont destinées à la préparation des cours. Les enseignants du primaire, en particulier, font face à une pression croissante de la part des parents et à une hausse du nombre d’enfants présentant des problèmes lourds.
Mais à force d’entendre les syndicats dresser un tableau catastrophique de la profession, et face aux fermetures de classes à répétition lors des grèves, une partie de la population commence à être lassée. S’il est clair que les maîtres et maîtresses de ce canton méritent un vrai débat autour de leurs conditions de travail, de l’école inclusive et du numérique, un brin de retenue serait bienvenu, surtout quand on constate que l’herbe n’est pas forcément plus verte ailleurs. Il en va de même pour les banderoles suspendues aux fenêtres des établissements. Les lieux de formation ne doivent pas devenir des lieux de militantisme. Il y va de la neutralité et de la dignité de nos institutions. PAGE 3
Dans le privé, beaucoup de travailleurs n’ont pas vu leur salaire augmenter depuis des lustres
Copyright Le Temps SA Dec 9, 2025