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Marylène Lieber, Janine Dahinden et Ellen Hertz (eds) - Cachez ce travail que je ne saurais voir. Ethnographies du travail du sexe (2010). Lausanne, Antipodes, 228 p.
Une introduction dense et vigoureuse, écrite non sans humour dans une langue parfaite, nous invite à lire neuf chapitres, dont chacun constitue une monographie sur les différents aspects du travail du sexe, ainsi qu'une synthèse finale, écrite par Paola Tabet. En fait les monographies qui constituent la matière empirique du livre portent, pour six d'entre elles, sur des prostituées. Dans deux cas celles-ci opèrent dans des milieux fermés, 'bordel' ou hôtel de prostitution (en Bolivie ou au Brésil), dans les six autres dans des milieux ouverts. Les trois autres monographies mettent en scène une call-girl, dont l'activité se déroule dans son appartement, des acteurs et actrices de films pornographiques ou des danseuses de cabaret.
L'introduction plaide pour que l'on considère ces activités, diverses et répétées, supposant la dénudation du corps, comme du travail, à partir du moment où elles supposent une interaction à autrui sous forme de services divers, liés ou non à la sexualité. D'autre part, cette introduction prône la méthode ethnologique et l'observation participante comme véhicules permettant d'obtenir les données les plus fiables et approfondies sur ces métiers que la morale bourgeoise veut garder en dehors de la décence, donc de la normalité. Ces métiers à la fois humbles, décriés et objets de fantasmes, qui ont tant de mal à se faire reconnaître comme des dépenses d'énergies qui méritent paiement, c'est-à-dire un labeur. Une des raisons, soulignée plusieurs fois dans le livre, serait que ces travaux sont vus comme assimilés à une supposée nature féminine, faite d'enjolivement, de séduction et de passivité. La critique de ce stéréotype peut être, par exemple, lue dans le chapitre écrit par Pascale Absi, à partir de sa recherche sur les prostituées des mines boliviennes et des verbatims des propos de certaines d'entre elles.
Les monographies nous...