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Derrière le voile du plaisir, la représentation du rapport sexuel s'organise rarement sans angoisse. Le fantasme de viol est une figuration fréquente pour aménager cette angoisse. On rencontre ce fantasme chez presque toutes les femmes. Il est particulièrement présent à certaines périodes du développement comme l'adolescence; chez la femme adulte il ne se manifeste le plus souvent que sous une forme fruste. On en retrouve des dérivés dans les cures à travers le transfert ou la résistance; certains symptômes névrotiques phobiques se développement autour de ce scénario.
Nous aborderons ici l'angoisse liée au rapport sexuel selon l'angle de l'angoisse génitale, celle qui fait intervenir la mise en cause du corps sexué, dans l'aménagement du lien entre l'éveil libidinal du sujet et la rencontre de l'objet nécessaire à la satisfaction. Ce corps sexué s'organise autout de la représentation des organes génitaux. Cette représentation va contribuer au développement du scénario fantasmatique à travers lequel la pulsion sexuelle va s'exprimer. Le potentiel traumatique et la conflictualité inhérente à la différence des sexes et à celle des générations vont construire ce scénario afin de tamiser, contourner et figurer les enjeux contradictoires entre l'accès à la satisfaction libidinale et l'inquiétante incomplétude narcissique à laquelle nous confronte la sexualité.
Le fantasme de viol est un confluent fréquent par où transitent des angoisses génitales féminines. Il est cependant souvent présenté sous des formes stéréotypées, condensées ou diffuses. Nous nous arrêterons ici à en développer différents aspects: les éléments descriptifs, les fonctions défensives et certains ancrages dans la maturation pulsionnelle.
Le fantasme s'appuie sur une théorie infantile du rapport sexuel élaborée en fonction de la réaction à la différence des sexes d'une part et à la représentation du corps sexué d'autre part. Sans négliger la configuration symbolique du complexe de castration lié à la différence sexuelle, nous allons plutôt prendre comme point de départ la représentation du corps sexué. Dans ce contexte, on peut dire que la controverse sur la sexualité féminine des années 1920 et 1930, élaborée à partir de l'incomplétude des théories de Freud à ce sujet, a occulté l'examen plus attentif du fantasme de viol. Dans l'oeuvre de Freud, ceci s'est fait selon deux façons: en reléguant la méconnaissance du vagin derrière l'envie du pénis; en posant l'angoisse génitale...